Jean-Christophe Rufin : Le Grand Cœur

Le Grand Cœur     par     Jean-Christophe Rufin,

nrf, Gallimard (2012) 512 pages ; Folio (2014) 592 pages.

  

Lire Jean-Christophe Rufin est toujours un pur régal. Qu’importe la longueur du livre : son style, clair et précis, de même que son récit, toujours très documenté, sont des compagnons précieux qui rendent le temps, passé en compagnie de cet auteur, infiniment agréable.

 

 

Le Grand Cœur pourrait être une biographie mais Jean-Christophe Rufin (photo ci-dessous) s’est octroyé quelques infidélités à ce que nous savons de l’histoire de Jacques Cœur, un homme célèbre qui a marqué son enfance passée dans la bonne ville de Bourges.

 

 

Comme il l’explique très bien dans la postface, l’auteur a  voulu « dresser un tombeau romanesque » à cet homme qui n’en a pas et sur lequel on a raconté tant de choses inexactes. Ainsi, c’est Jacques Cœur qui raconte, à la première personne, cette vie qui fut tellement extraordinaire. Capable d’aller jusqu’en Orient mais aussi en Flandres, en Italie, en Languedoc, en Grèce, à une époque où voyager n’est pas facile, Jacques Cœur nous fait partager ses expériences, ses émotions, ses déceptions, ses amours.

 

 

Le récit commence alors que notre homme a 56 ans, qu’il est en pleine santé mais qu’il est exilé sur l’île grecque de Chio, redoutant d’être assassiné. Ex-argentier du roi de France, Charles VII, il décide d’écrire ses mémoires.

 

Né à Bourges, au moment où Charles VI devenait fou, il a un frère et une sœur et le pays est en guerre depuis un siècle. Son père est pelletier. Un jour, un gitan veut lui vendre un léopard d’Arabie pour la peau et Jacques Cœur, enfant, assiste à la scène. Depuis, l’Arabie l’attire de plus en plus alors qu’il constate, en jouant avec ses camarades, que le pouvoir de l’esprit est supérieur à la force pure.

 

Il épousera Macé, son premier amour. Elle a 18 ans et lui 20. Sa belle-famille lui fait découvrir le commerce de l’argent mais il découvre aussi la misère du pays pendant que sa femme lui donne quatre enfants. Ravaud, un nouvel ami venu du Nord, est monnayeur et lui propose de s’associer. Pour bien se rémunérer, ils trichent et sont arrêtés. Ainsi, Jacques Cœur connaît, pour la première fois, la prison, une épreuve violente et la honte qui l’accompagne…

 

Au cours d’un voyage à cheval, il découvre le Rhône, de nouvelles plantes, la langue d’oc, Montpellier et la mer ! Il n’a plus qu’un seul désir : naviguer jusqu’en Orient. C’est ainsi qu’il embarque à bord d’une galée, voilier dont on peut voir une reproduction sur un vitrail du Palais Jacques Cœur, à Bourges.

 

« J’avais enfin le sentiment de vivre. » On ne peut être plus clair. Jacques Cœur découvre Agrigente, la Crète, Alexandrie, Beyrouth et  va jusqu’à Damas où il reste ébahi par une caravane de 2 000 chameaux partant commercer avec la Chine… Pour lui, Damas est le centre du monde avec ses jardins, les bains de vapeur, les parfums, les tapis, les tissus soyeux, etc… Ainsi, ce voyage marque le restant de sa vie de façon indélébile, même si le retour est pénible avec quelques semaines de prison en Corse.

 

Dès son retour à Bourges, il recrute d’anciens camarades pour créer sa maison de négoce avec l’Orient. Son nom devient une marque, un mythe car le succès est immédiat. Pourtant, il n’est pas satisfait tant qu’il n’a pas rencontré le roi, Charles VII. Ce sera fait à deux reprises, à Bourges puis à Compiègne. Le roi lui confie la ferme des monnaies pendant que ses propres affaires prospèrent.

 

Ainsi va la vie d’un homme qui consent des prêts, lie finance et commerce et vit au plus près du roi depuis qu’il est devenu Argentier, c’est-à-dire qu’il assure l’intendance de la Cour. Ses affaires étant imbriquées avec celles du roi, il se prépare des problèmes qui ne manqueront pas d’arriver. Le temps passe et le livre fourmille d’aventures, d’événements permettant de mieux comprendre cette période cruciale de l’Histoire de notre pays basculant peu à peu vers la Renaissance.

 

Nous n’oublions pas, bien sûr, Agnès Sorel, devenue la maîtresse du roi mais que Jacques Cœur aime passionnément. Pour connaître tout cela en détails, il ne faut pas hésiter à se lancer dans la lecture du Grand Cœur, un livre émouvant et passionnant qui m’a été offert par Marie-Noëlle, Marie-Thérèse, Myriam, Adrien, Benoît et Denis que je remercie très sincèrement.

Jean-Paul

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