De Jongh et Chabbert : Soixante printemps en hiver
-
Soixante printemps en hiver BD par De Jongh et Chabbert.
Aire Libre - Dupuis (2022) 112 pages.
/image%2F3417118%2F20220616%2Fob_5532f0_9791034747375-couv-m700x1200.jpg)
Alors que la neige recouvre le paysage, devant les yeux ébahis de sa famille, Josy se barre de chez elle, le jour de son anniversaire, refusant de souffler les soixante bougies du gâteau préparé à son intention. Elle déclare « je pars » ! Sa décision prise, sa valise prête, elle prend aussitôt le volant de son vieux van Volkswagen. Elle se pose sur une aire de camping-car où est déjà stationnée une caravane d’où sort une jeune femme, Camélia, un bébé dans les bras. Celle-ci est partie de chez elle « quand j’ai su qu’il allait voir ailleurs j’ai pris mes cliques et mes claques… et mon gamin ».
Pour ce qui est de Josy, on comprend peu à peu, qu’un mal-être l’a envahie, qu’elle a besoin de renouveau, sa vie étant devenue fade. Ce sont son mari certes, pas violent, mais quasi inexistant, l’amour devenu tendresse avec l’usure du temps, après 35 ans de mariage, ses deux enfants qui, devenus adultes ont bien changé, son fils devenu égoïste et sa fille ne se souciant que de ce que pensent les autres, qui l’ont amenée à s’affranchir des contraintes familiales et à ce désir de renaissance avant qu’il ne soit trop tard.
/image%2F3417118%2F20220616%2Fob_cd2ea8_titreoff114324.jpg)
Pour retrouver cette liberté, elle va essayer de se défaire de tous ces liens et ce ne sera pas chose aisée avec les appels incessants et culpabilisants de ses enfants qui l’aiment mais ne font rien pour tenter de la comprendre. De plus, il lui est difficile de discuter car il ne fait pas bon être dans la peau de celle qui part la première.
De quoi donner, peut-être, en lisant ce récit émouvant et moderne, l’envie à certaines de franchir le pas et de partir sur les traces de cette Josy si touchante et attachante…
Sur les conseils de Camélia, elle va assister à une réunion du CVL, Club de Vilaines libérées et va redécouvrir l’amour auprès d’une autre femme, mais difficile de s’extraire du regard des autres
.
/image%2F3417118%2F20220619%2Fob_04a3d9_ingrid-chabbert.jpg)
Outre le tabou du changement de vie, c’est aussi celui du changement d’orientation sexuelle qui sont abordés dans ce magnifique album oneshot et que la scénariste Ingrid Chabbert (photo ci-contre) transcrit si bien, avec pudeur, sensibilité et tendresse, n’hésitant pas à laisser certaines vignettes vides, quand les dessins se suffisent à eux-mêmes.
Ce désir de liberté, d’être soi qui peut toucher tout un chacun à une époque de la vie, Aimée de Jongh (photo ci-dessous) l’a particulièrement bien exprimé et mis en valeur avec des dessins très sobres où les traits des personnages sont particulièrement expressifs et révélateurs de leur état mental et de leur ressenti.
/image%2F3417118%2F20220619%2Fob_b269e4_aimee-de-jongh.jpg)
Ses dessins sont sublimés par des tons d’aquarelle qui réussissent à créer des ambiances magnifiques et à restituer les émotions dans un univers très intimiste.
Soixante printemps en hiver : superbe collaboration de deux talents !
Je dois dire que, simplement en découvrant la belle couverture de ce roman graphique et en le feuilletant, j’étais déjà en partie conquise. Sa lecture n’a fait que confirmer mon intuition.
Un grand merci à Babelio et à Aire libre-Dupuis !
Ghislaine