Maylis de Kerangal : Réparer les vivants
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Réparer les vivants par Maylis de Kerangal.
Verticales (2014), 280 pages ; Folio (2015) 304 pages.
Prix Orange du Livre 2014.
Roman des étudiants France Culture - Télérama 2014.
Prix RTL - Lire 2014.
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Réparer les vivants a beaucoup fait parler, troublant ceux qui se plongeaient dans sa lecture. Écrire sur les transplantations n’est pas facile mais Maylis de Kerangal a su le faire en partant d’un cas concret, nous plongeant d’emblée dans la vague de ces jeunes surfeurs, amateurs de sensations fortes.
L’écriture est déferlante avec de très longues phrases semblables à ces vagues s’étalant sans cesse sur le rivage mais cela change et s’accélère jusqu’à l’accident, au retour. Dans le van, Simon est le seul à ne pas avoir de ceinture de sécurité. Lorsque le Samu l’amène aux urgences, le constat est sans appel : « Le cerveau de Simon Limbres est en voie de destruction, il se noie dans son sang. »
Toujours très technique comme pour chaque sujet qu’elle aborde, l’auteure présente tous les protagonistes dont Pierre Révol, chirurgien de garde en réanimation, à l’hôpital du Havre. Il est né en 1959, année où on a redéfini la mort : « L’arrêt du cœur n’est plus le signe de la mort, c’est désormais l’abolition des fonctions cérébrales qui l’atteste… cela autorise et permet les prélèvements d’organes et les greffes. »
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La famille de Simon est avertie et la coordination des prélèvements d’organes et de tissus entre en action avec Thomas Rémige qui joue un rôle fondamental. Là aussi, l’auteure réalise une description soignée de tout ce qu’on peut entendre dès qu’il s’agit de l’hôpital. Maîtrisant son sujet à fond, Maylis de Kerangal (photo ci-dessous) présente l’Agence de la biomédecine, à Saint-Denis pendant que Marianne et Sean, les parents de Simon sont assommés par la demande de don d’organes : « Le corps de Simon n’est pas un stock d’organes… »

« Enterrer les morts et réparer les vivants », tout est détaillé jusqu’au Pôle national de répartition des greffes qui recense les receveurs compatibles. La course contre la montre est palpitante jusqu’au moment où « … un bocal spécial qui recèle le cœur de Simon Limbres, qui recèle rien moins que la vie, une potentialité de vie…» arrive à Paris.
Au fil des pages, l’extrême difficulté de telles avancées médicales est évidente mais l’auteure ne néglige aucun des obstacles moraux et psychologiques que doivent surmonter les proches, sans oublier la reconstruction indispensable du corps du donneur pendant que son cœur, ses reins, ses poumons et son foie permettent à d’autres de vivre.
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En écrivant Réparer les vivants, sans négliger ceux qui meurent, Maylis de Kerangal a réussi un formidable récit captivant de bout en bout tout en ménageant quelques pauses pour atténuer une tension extrême.
Jean-Paul