Jean Giono : Regain
-
Regain par Jean Giono
Bernard Grasset (1930), Le Livre de Poche (1967) 185 pages.
Le régal est à nouveau au rendez-vous car lire Jean Giono, c’est retrouver une simplicité et une beauté dans le style comme dans les décors et les personnages qu’il campe. Tant pis si je ne lis pas dans l’ordre La Trilogie de Pan (Colline, Un de Baumugnes, et Regain) puisque le troisième opus me tombait sous la main, je n’ai pas hésité et je ne l’ai pas regretté.
La description très vivante de ce village d’Aubignane, pas très loin de Manosque, quelque part du côté de Banon, rend vite nostalgique d’une période pas si lointaine mais, à la réflexion, que la vie y était dure ! D’ailleurs, le village se meurt. Gaubert, le vieux forgeron, s’en va chez « l’enfant ». Le Panturle a perdu sa mère, « victime du mal » et la Mamèche qui a vu son homme enseveli au fond du puits qu’il creusait pour fournir de l’eau au village, est un peu folle…
Pourtant, le Panturle est encore jeune et plein de vie, à quarante ans. Aussi, la Mamèche promet de lui trouver une femme, avant de disparaître mystérieusement. Pendant ce temps, Giono nous présente Gédémus, un rémouleur. Il part de Sault avec une jeune femme, Arsule, connue auparavant sous le nom de Mademoiselle Irène. Comme par hasard, c’est elle qui tire la carriole… enfin, quand c’est son tour !
L’auteur nous gratifie alors de scènes magnifiques sur le plateau, en plein vent avec des apparitions bizarres jusqu’à ce qu’on se retrouve près d’Aubignane mais là, il ne faut plus rien dire afin de ne pas divulgâcher la fin de l’histoire, les moments les plus savoureux de lecture.
Son roman étant divisé en deux parties, la seconde est formidable d’espoir, c’est le Regain ! j’ai adoré ces scènes de travail dans les terres remises en culture, celles de la foire de Banon et les remarques concernant ce blé d’Inde imposé par certains conseillers agricoles bien intentionnés, blé qui ne supporte pas le climat sec et chaud de ce qu’on appelle aujourd’hui les Alpes de Haute-Provence. Je pense que ce qu’écrit Jean Giono entre les deux guerres mondiales devrait bien faire réfléchir aujourd’hui.
L’auteur gratifie même son lecteur d’un retour improbable d’un certain Gédémus et d’une fin très morale. Je le répète, lire Giono (photo ci-dessus) est un véritable délice car il raconte si bien, faisant revivre une époque où l’homme vivait en harmonie avec la nature, souffrait avec elle mais savait la respecter pour en obtenir la nourriture indispensable à sa subsistance.
Formules savoureuses, expressions d’autrefois donnant une langue ô combien moderne et chantante qui charme toujours le lecteur près d’un siècle plus tard, c’est Giono !
Jean-Paul