Leonardo Padura : L'homme qui aimait les chiens

L’homme qui aimait les chiens    par    Leonardo Padura.

Éditions Métailié (2011) 741 pages ; Points (2014) 816 pages.

Titre original : El hombre que amaba a los perros.

Traduit de l’espagnol (Cuba) par René Solis et Elena Zayas.

Prix des Librairies Initiales - 2011 ; Prix Roger Caillois - 2011 ; Élu Meilleur roman historique par le magazine Lire - 2011 ; Prix Carbet de la Caraïbe - 2011

 

 

Fresque foisonnant de détails historiques adroitement mêlés à la fiction, L’homme qui aimait les chiens m'a emmené à Cuba, d’abord, puis en Espagne, en Union soviétique (l’ex-URSS), en Turquie, en France, en Norvège et enfin au Mexique, suivant le parcours extraordinaire de Lev Davidovitch Bronstein, plus connu sous le nom de Léon Trotski.

 

L’auteur, Leonardo Padura (photo ci-dessous), est un écrivain cubain confirmé qui s’est rendu célèbre grâce à ses romans policiers. Avec talent, il mène de front le récit que fait Iván, un écrivain à la peine, installé à La Havane en 2004, et la vie mouvementée de Trotski. Sans concession pour la situation de son pays, il rappelle : « …des années irréelles, vécues dans un pays obscur et lent, toujours chaud, qui s’effondrait plus chaque jour. »

 

Brusquement, on délaisse Cuba pour se retrouver à Alma-Ata, ville du Kazakhstan (Almaty aujourd’hui), le 20 janvier 1920, avec Trotski, Natalia Sedova, son épouse, leur fils, Liova, et leur chienne, Maya, de la race barzoï. Mis à l’écart, déportés par Staline, les voilà maintenant, par moins 40 degrés, près de Samarkand, en Ouzbékistan aujourd’hui.

 

Enfin, voici Ramón Mercader, en pleine guerre civile d’Espagne, avec sa mère, Caridad, qui lui demande de tout donner pour la cause. L’auteur décrit bien l’ambiance et les luttes internes entre les diverses composantes du camp républicain. Le récit foisonne d’anecdotes. Il est haletant aussi alors que chacun sait comment cela va se terminer…

 

Grand amateur des livres de Raymond Chandler, Iván, sur la plage de Santa María del Mar, lit la nouvelle intitulée « L’homme qui aimait les chiens », publiée en 1936. Sur cette même plage, il se lie avec un homme étrange qui vient faire courir là ses deux lévriers russes, des barzoïs encore. Cet homme dit s’appeler Jaime López.

 

Au fil des pages, je me suis attaché aux pas de Trotski, travailleur acharné qui, dans sa sévère disgrâce, réalise ses propres erreurs et comprend toute l’horreur d’une dictature stalinienne qui élimine sans cesse tous ses compagnons de route. En 1932, Trotski et sa famille perdent leur citoyenneté soviétique. Il est même déclaré : « Ennemi du peuple » alors qu’en URSS, des millions de paysans meurent de faim, des centaines de milliers d’hommes et de femmes se retrouvent dans des camps de travaux forcés, des colonies de déportation et vivent pieds nus…

 

Après une île turque, Trotski peut vivre en France, à Saint-Palais (Charente), à Barbizan et même Chamonix et Domène (Isère). Pourchassé et inquiété aussi bien par les communistes staliniens que par les « cagoulards » fascistes, il se réfugie en Norvège où il reconnaît que « le stalinisme s’avérait être la forme réactionnaire et dictatoriale du modèle socialiste. »

 

En parallèle, j'ai suivi le parcours de Ramón Mercader, conditionné pour commettre l’irréparable alors que disparaissent peu à peu tous les proches de Trotski. À Mexico, Diego Rivera et Frida Kahlo hébergent le proscrit. Tout le stratagème de son futur meurtrier est méthodiquement décrit avec juste ce qu’il faut de fiction pour aller au bout de ce qui reste inéluctable : l’assassinat.

 

L’homme qui aimait les chiens est une fresque passionnante qui donne envie d’en savoir plus sur toute cette époque et conte enfin ce qui fut la suite de ce drame mexicain.

 

Merci à Simon qui a eu la bonne idée de nous offrir ce livre.

Jean-Paul

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