Cécile Coulon : Une bête au Paradis
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Une bête au Paradis par Cécile Coulon.
L’Iconoclaste (2019), 345 pages ; Le Livre de Poche (2021) 288 pages.
Prix du journal Le Monde 2019.
Un roman prenant et magnifique qui hante quelque temps, après sa lecture !
Dès les premières lignes, description est faite de ce qu'est ce Paradis : une ferme isolée au bout d'une route sinueuse, une cour avec au centre un arbre centenaire, des dépendances et une fosse à cochons.
Blanche, 80 ans se souvient.
Émilienne, la grand-mère est la gardienne du Paradis. À la mort de sa fille Marianne et de son gendre Étienne tués dans un accident de voiture, elle élèvera ses deux petits-enfants Blanche et Gabriel.
Louis, un adolescent qu'elle sauvera de la violence de son père viendra vivre à la ferme et lui sera totalement dévoué sans pour autant faire partie de la famille.
Puis, il y aura Alexandre, le bel Alexandre, doux séduisant mais ambitieux qui répugne à vivre la vie simple et résignée de ses parents. Ce sera l'amour de Blanche, le grand amour.

Cécile Coulon (1) (photo ci-dessus) raconte une vie à la campagne avec le dur labeur que cela représente, l'isolement souvent, cet attachement à la terre qui fait oublier les peines, les fatigues mais aussi le plaisir et la joie de vivre dans un environnement unique. Malgré tout, c'est un investissement de chaque instant où il ya peu de place pour la vie personnelle. Cette vie rurale n'a pas été sans me rappeler le roman Joseph de Marie-Hélène Lafon.
Ce qui est le plus remarquable c'est la façon dont elle dépeint chaque personnage. Ses portraits tant physiques que psychologiques sont particulièrement beaux, frappants et d'une étonnante justesse. C'est un roman qui se déroule en crescendo. Comment l'amour peut conduire jusqu'à la folie !. Dès le début, une once d’inquiétude, d'angoisse est latente sans qu'on puisse la définir. Bien vite, nous allons comprendre que cet amour entre Blanche et Alexandre pourrait devenir tragique. Car, si Blanche est folle d'amour pour Alexandre, elle l'est également pour sa terre.

Les sentiments qui vont animer tous les personnages de ce roman, l'amour, la passion, la jalousie, l'ambition, la haine, la trahison, le renoncement, la vengeance sont restitués avec une maîtrise parfaite.
Les titres des chapitres : Faire mal, Protéger, Construire, Surmonter, Grandir, Tuer, Naître... sont autant de verbes qui nous font monter en tension, et donnent un rythme haletant à ce roman.
Bien que connaissant avant de le lire, la trame du livre, j'ai été captivée de bout en bout par cette intrigue, et suis restée admirative devant cette écriture concise, précise, colorée, fluide et avant tout plaisante. Une bête au Paradis est une sublime tragédie, un roman sur la vie à la campagne, noir, mais éblouissant !
Ghislaine
1 : Voir aussi Trois saisons d'orage.
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Une bête au Paradis par Cécile Coulon.
L’Iconoclaste (2019), 345 pages ; Le Livre de Poche (2021) 288 pages.
Prix du journal Le Monde 2019.
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Bouleversant, émouvant, après avoir été attendrissant et m’avoir laissé beaucoup d’espérances, Une bête au Paradis, de Cécile Coulon - auteure découverte et appréciée avec Trois saisons d’orage puis rencontrée aux Correspondances de Manosque 2019 – m’a fait passer par tous les sentiments.
Ce roman tellement bien écrit m’a plongé en pleine campagne, dans cette ferme appelée le Paradis, à une époque non précisée que je situerais dans les années 1960. Comme cela arrive assez fréquemment, les premières pages sont prémonitoires mais comment s’y arrêter et même s’en souvenir lorsque, comme beaucoup de lecteurs, je suis impatient de plonger dans l’histoire ?
Cette famille Émard a été frappée par un terrible drame. Émilienne, la grand-mère, s’est retrouvée seule pour élever Blanche et Gabriel, orphelins, leurs parents s’étant tués en voiture, tout près de la ferme.
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Après le texte introductif, débute une série de chapitres tous intitulés par un verbe laissant supposer ce qui va se passer mais sans rien révéler. Faire mal est le premier. Sans détour, Cécile Coulon (photo ci-contre) présente ses deux héros, Blanche et Alexandre, à peine sortis de l’adolescence. Ils font l’amour pour la première fois dans la chambre de la jeune fille pendant que le cochon tué par Louis, le commis, hurle à la mort. Odeur de sang, atmosphère de drame, je sens bien que rien ne va se passer normalement dans cette histoire.
Si les personnages vieillissent, quelques retours dans le passé éclairent l’histoire de cette famille qui a recueilli Louis, jeune garçon violenté par son père. Dévoué corps et âme aux travaux et à l’entretien du Paradis, malgré une dizaine d’années de plus, il aime et désire Blanche qui le repousse.
Finalement, tout le drame est là car la jeune fille tombe raide dingue amoureuse d’Alexandre, un camarade d’école, beau garçon à défaut d’être brillant scolairement. D’ailleurs, elle l’aide à réussir ensuite au lycée puis…
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Tout se joue dans ce Paradis, sorte de ferme idéale du temps passé où le modernisme agricole outrancier d’aujourd’hui ne semble pas s’être imposé encore même s’il est fait allusion à la concurrence et aux premiers suicides d’agriculteurs. L’autrice ne parle ni machines géantes, ni pesticides, ni engrais chimiques… Malgré tout, cette bête au Paradis est déjà confrontée à l’appétit de promoteurs voulant étaler villes et villages, construire, goudronner, bétonner les meilleures terres permettant de nous nourrir mais c’est un autre débat.
Je vous laisse découvrir, savourer, détester peut-être cette histoire peu ordinaire et très prenante qui confirme un peu plus le talent de Cécile Coulon.
Jean-Paul