Gérard Mordillat : La Brigade du rire

La Brigade du rire        par      Gérard Mordillat.

Albin Michel (2015). 528 pages ; Le Livre de Poche (2016) 640 pages.

 

 

Pierre Ramut sort de l’hôtel Westminster, au Touquet. Ce journaliste célèbre, auteur de La France debout est accosté par une admiratrice, « une jeune fille blonde, lunettes en plastique rouge, décolleté avantageux » qui lui fait dédicacer son livre puis l’emmène jusqu’à une voiture où débute une histoire extraordinaire.

 

 

La verve de Gérard Mordillat (Xénia, Les vivants et les morts, Rouge dans la brume) et la justesse de ses analyses à propos de notre société se révèlent une nouvelle fois très pertinentes et percutantes grâce aux retrouvailles de ces anciens camarades de lycée décidés à célébrer une victoire lors d’un tournoi scolaire de hand. Chacun a son histoire et, tout au long du livre, l’auteur nous emmène d’abord dans les pas de Kol qui vient d’être licencié. Il raconte ses batailles syndicales : « Il fallait obtenir des garanties, des primes, ces merdes ou ces hochets qui sont distribués à chaque fermeture d’entreprise. », et ses galères pour retrouver du travail.

 

 

L’Enfant-Loup, le second compère, est garagiste dans le Nord. Il ne se retrouve plus dans la vie actuelle : « La société n’était plus démocratique ni républicaine. Il n’y avait plus de vertu, que de la cupidité et du cynisme. »

 

 

Dylan est prof d’anglais. Il vit avec deux sœurs, Dorith et Muriel qui sont très délurées : « s’aimer c’est rire ensemble même quand il y a de quoi pleurer. » Arrive Zac Bergmann : « le juif rouquin qui jouait à l’arrière-centre, était devenu un gros poussah aux joues mal rasées, à la mine négligée, à la volubilité anxieuse. » Il est critique de cinéma. Puis voilà Rousseau, prof de droit du travail et Hurel, l’arrière-gauche. L’équipe serait au complet si Bob, le gardien était là mais Victoria le remplace…

 

 

Les conversations s’enchaînent et s’enflamment puis le plan se met en place pour s’occuper de l’éditorialiste de Valeurs Françaises, Pierre Ramut : « Le faire travailler dans les conditions qu’il met en exergue dans son journal. Pas les brigades rouges mais La Brigade du rire. »

 

 

Si tout se passe comme prévu, chacun se débat avec ses problèmes personnels et son histoire ce qui peut nous emmener jusqu’en Israël. Pour ne pas être reconnus plus tard, ils portent les masques des sept nains avec une combinaison de travail, des gants et des chaussures de sécurité.

 

 

Les discussions sont édifiantes car les réponses aux questions de Ramut sont les propres arguments qu’il développe à longueur d’articles. Lui qui veut supprimer les 35 h, passer à 40 ou 48 h, il va être obligé de travailler afin de perforer des pièces métalliques avec une perceuse à colonne. Il va faire les 3x8 et 600 pièces à l’heure pour gagner le Smic moins 20 % « afin de rivaliser avec les Chinois. » Un forfait nourriture, logement, eau, électricité sera déduit mais un bleu lavé et repassé lui sera fourni chaque semaine… Au bout de plusieurs semaines, L’Enfant-Loup pourra dire à Ramut : « On ne rabaisse personne en le faisant travailler… Vous travaillez et comme travailleur vous avez droit à notre respect. »

 

 

La Brigade du rire est un livre très vivant, souvent drôle avec des rebondissements et des discussions sur le cinéma qui posent « la seule question que Sautet posait quand on lui parlait d’un scénario, c’était : « Ça finit comment ? » Et bien, lisez Gérard Mordillat et vous ne serez pas déçus !

Jean-Paul

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Thème Magazine -  Hébergé par Overblog