Daniel Berthet : Comme un oiseau sur la mer...

Comme un oiseau sur la mer…      par     Daniel Berthet.

 Kariel B. Edition (2020) 218 pages.

 

J'ai à nouveau été conquise par le dernier roman de Daniel Berthet, Comme un oiseau sur la mer.

 

 

Celui-ci débute en décembre 2001, à Khan Yunis, ville palestinienne du sud de la Bande de Gaza, par un bombardement sur le camp de réfugiés Al Amal, dans lequel  Mounir va perdre les membres de sa famille, sauf son frère Jamal et voir sa maison détruite. Ils devront dorénavant vivre sous une tente. Jamal s'était engagé dans le mouvement de résistance depuis la mort de son père, il y avait à peine plus d'une année, avant tout pour faire vivre sa famille. Il va alors financer les études de Mounir qui va réussir le baccalauréat, et son master, rencontrer Hadda qui vit dans le camp de Jabaliya.

 

 

Jamal sera tué, en 2012 par une balle tirée par un snipper du poste garde-frontière. Dans l'attente d'un visa pour l'Europe, pour fuir l'enfer de Gaza, Mounir et Hadda se marient et ont une fille Amal. Mais Hadda est tuée en même temps que ses parents par un bombardement sur Jabaliya.

 

 

En 2016, alors qu'Amal souffre d'une dermatose sévère, Mounir doit la conduire en Égypte pour y être soignée. Il décide alors de ne pas rentrer. Il va atteindre la Tunisie et embarquer avec d'autres migrants pour traverser la Méditerranée, avec son enfant, ayant pris soin de transformer le sac dans lequel elle dormait en véritable mini canot de sauvetage. "Ne pas mettre sa fille en danger, c'était devenu une obsession pour le père". Mais une chose plus qu'importante est à noter : Mounir a pris soin de glisser dans la poche intérieure du sac une enveloppe plastique contenant la clef rouillée et la photo jaunie de la maison de Burayr,  village détruit lors de la Nakba. Jamal les avait confiées à son frère pour les transmettre à ses enfants. Cette petite fille sera retrouvée sur une plage française et un long chemin mouvementé l'attend.

 

 

 

C'est donc une véritable épopée avec beaucoup d'aventures et beaucoup de suspense que nous livre Daniel Berthet. Mais c'est avant tout l'histoire de ce peuple palestinien, ce peuple éclaté pour qui la liberté de circuler n'existe pas. Ils doivent chaque jour résister pour tenter de sauver leurs terres face aux colons toujours plus envahissants, sous l'œil indifférent des autres nations. Ce sont les souffrances, les insultes, les attentes sans fin aux checkpoints, les bombardements subis depuis plus de soixante-dix ans, depuis la Nakba en 1948 qui a vu l'expulsion de plus 700 000 palestiniens de leur terre et de leurs villages par les troupes sionistes, processus continuant encore aujourd'hui, qui sont la trame de ce roman.

 

 

Ce roman permet de façon simple mais extrêmement bien documentée de comprendre la lutte que mène le peuple palestinien entré en résistance, qui exige que justice lui soit rendue et que cesse enfin l'apartheid.

 

 

Comme un oiseau sur la mer, l'histoire de cette petite palestinienne naufragée nous raconte la lutte menée dans ces territoires occupés pour sauver l'espace qui se réduit de plus en plus.

 

 

Tout en sachant que le combat sera long, les palestiniens ne baissent pas les bras et même si les anciens meurent, les jeunes n'oublient pas ! C'est donc, à la fois un constat de combat voué à l'échec et en même temps un entêtement et une volonté qui ne se démentent pas et qui espérons-le seront finalement entendus.

 

 

 

Comme le dit si justement Patrice Saunier dans sa préface : « Comment un peuple peut-il assujettir un autre peuple quand il a été lui-même tant persécuté ? » Je dirais même comment un peuple peut-il en assujettir un autre ?

 

 

Ce livre, une fois ouvert, ne peut se refermer tant on est happé par ces personnages que l'auteur a su parfaitement rendre vivants et attachants et à qui il a su donner une force remarquable. Par des histoires croisées, de femmes principalement, ce sont l'amour, l'entraide, le courage,  la ténacité, la souffrance souvent mais aussi l'espoir qui sont mis en lumière et qui illuminent ce récit tout en sensibilité que je recommande chaleureusement.

 

Ghislaine

 

Les sept premiers romans de Daniel Berthet (photo ci-dessus) que vous pouvez trouver sur le blog :

- Il faut sauver le Saint-Esprit

- Justice aux poings !

- L'anneau de Saint-Jérôme

- Porteurs de rêves

- Au nom de notre bonne foi !

- 1851 Marianne des Mées

- Putain de Guerre !

 

 

 

 

 

 

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