Judith Perrignon : Victor Hugo vient de mourir

Victor Hugo vient de mourir      par    Judith Perrignon.

L’Iconoclaste (2015), 246 pages ; Pocket (2017) 168 pages..

 

Au 50, de l’avenue qui porte déjà son nom, Victor Hugo va mourir… L’émotion, la crainte, l’appréhension sont à son comble car le grand poète s’est enrhumé dans la cour de l’Académie, le jour de la réception de son ami, Ferdinand de Lesseps. Victor Hugo à 83 ans : « …on dirait qu’un astre va s’éteindre dans le ciel. »

 

Peu de temps après avoir lu Le Paris de Victor Hugo, de Nicole Savy puis Le banquet des affamés de Didier Daeninckx, ce petit bijou signé Judith Perrignon (photo ci-dessous) venait à point. Au fil des pages, elle m'a fait vivre les dernières heures du grand homme, toutes les tensions, les luttes d’influence, la surveillance policière et m'a permis de partager les sentiments des proches. L’auteure s’exprime avec une écriture simple, agréable, touchante, précise.

 

Le clergé attend que Victor Hugo réclame un confesseur mais il ne cèdera pas. Sa famille proche est réduite : «… tous ces morts chez cet ogre qui a enterré femme et enfants… » Ses vieux amis, Auguste Vacquerie et Paul Meurice sont là : « Ils ont tout connu, tout partagé… un mélange d’amitié et d’allégeance. » Georges et Jeanne, ses petits-enfants, l’appellent « Papapa ». Ce sont les enfants de Charles et Alice, leur mère, devenue Mme Lockroy, depuis huit ans. Judith Perrignon suit Édouard, son mari, député à l’Assemblée Nationale.

 

La police surveille tout le monde, journalistes, anarchistes, ouvriers, avec ses infiltrés car la mort du poète représente un danger. Il ne faudrait pas que Les Misérables, le peuple de Paris se réveille. Cinq cents personnes restent en permanence devant sa maison mais, après une dernière rémission, à 1 h 20 de l’après-midi, Victor Hugo, meurt le 22 mai 1885 !

 

Dès que la nouvelle se répand, la foule devient de plus en plus considérable. Les officiels viennent saluer sa dépouille. « Hugo, ne le pleurons pas ! » affirme Maxime Lisbonne, l’ancien colonel de la Commune, condamné aux travaux forcés, homme de théâtre aussi, que Didier Daeninckx a su sortir de l’oubli. « Il écrivait si bien mais pas une ligne sur la semaine sanglante et ses 40 000 cadavres. Il nous a abandonnés. » Maxime Lisbonne « saigne encore, le bagne, ses fers, ses fouets, ses tortures lui font mal. »

 

Depuis, « la République s’est installée, elle est bourgeoise, elle combat Dieu et les tyrans, mais elle vénère l’argent. » Malgré les pressions, les décrets sont tombés : « Le Panthéon est rendu à sa destination première et légale. Le corps de Victor Hugo y sera déposé. » L’extrême-gauche réclame de pouvoir défiler avec le drapeau de son choix mais ce sera impossible, la police sera intraitable.

 

Son corps est embaumé. Les obsèques ont lieu le lundi 1er juin et non le dimanche comme les ouvriers auraient aimé pour pouvoir être présents car ce lundi ne sera pas férié : « La République avait fait fermer écoles, théâtres et magasins mais avait préféré les travailleurs à l’usine plutôt que sur les trottoirs. »

Photo ci-dessus : Le dernier souffle de Victor Hugo.

Sur le parcours, on loue fenêtres, balcons, escabeaux, gradins… L’Arc de Triomphe est voilé, le cercueil de plomb y est déposé pour un dernier hommage populaire mais c’est un modeste corbillard qui le transporte. « La République, ce jour-là, étouffait l’homme révolté. » Mais reste « la phrase », les mots du poète qu’il ne faut pas réduire et laisser vivre.

Jean-Paul

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