Antoine Leiris : Vous n'aurez pas ma haine
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Vous n’aurez pas ma haine par Antoine Leiris.
Fayard (2016), 138 pages ; Le Livre de Poche (2017) 128 pages.
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Cette « nuit de barbarie » du 13 novembre 2015, personne ne l’a oubliée. Ce soir-là, Antoine Leiris est seul avec Melvil, bébé encore, qui dort. Maman n’est pas là. Hélène est au Bataclan. Des appels demandant s’ils sont « en sécurité » l’intriguent et c’est la stupeur quand il découvre le bandeau défilant sur les chaînes d’info : « Attentat au Bataclan ».
Il appelle Hélène au moins cent fois… pas de réponse. Son frère, sa sœur, la mère d’Hélène sont là et « La chasse au fantôme peut commencer » d’un hôpital à l’autre. Ainsi, ce petit livre poignant et émouvant de simplicité, terrible de douleur, égrène les jours et les heures vécues par ce père qui doit faire patienter un enfant qui ne comprend pas l’absence de sa mère.
Il faut lui dire et assister, impuissant, à son premier vrai chagrin, après dix-sept mois passés ensemble, tous les trois. Les mots défilent et font mal : « Je ne pardonne rien, je n’oublie rien, je ne passe sur rien et surtout pas si vite. » Pour celle qui ne rentrera jamais : « Elle sera avec nous, invisible. C’est dans nos yeux qu’on lira sa présence. »
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Quant au soutien psychologique, il évite : « J’ai l’impression qu’ils veulent me voler. Me prendre mon malheur. » Enfin, il peut la retrouver à l’Institut médico-légal : « La voir m’a fait du bien » mais il faut affronter « toutes ces tracasseries administratives qui polluent le chagrin. »
Arrivent alors les mots très forts destinés aux assassins : « Je ne sais pas qui vous êtes et je ne veux pas le savoir, vous êtes des âmes mortes. » Pour Melvil, « toute sa vie, ce petit garçon vous fera l’affront d’être heureux et libre. Car non, vous n’aurez pas ma haine non plus. »
Tous les moments partagés avec son enfant rappellent ceux vécus à trois, comme l’heure du bain. Beaucoup de courrier arrive, des dessins d’enfants ainsi que des mots qui touchent : « C’est vous qui êtes frappés et c’est vous qui nous donnez du courage ! »
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Il faut enterrer Hélène, le 24 novembre, sans Melvil qui est trop petit mais son père écrit pour lui tout l’amour porté à sa maman. « Elle est avec nous. Nous sommes trois. Nous serons toujours trois. »
Ainsi, Antoine Leiris (photo ci-dessus) qui est journaliste, a réussi à mettre par écrit tout ce qu’il a ressenti et vécu après un drame que tant d’autres, comme lui, ont connu. Vous n’aurez pas ma haine est profondément humain, c’est un cri d’amour à celle qu’il aime et une leçon pour tous ceux tentés de répondre à la violence par la violence.
Jean-Paul