Timothée de Fombelle : Alma, le vent se lève
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Alma, le vent se lève par Timothée de Fombelle.
Gallimard Jeunesse (2020) 388 pages.
Prix France Télévision Roman Jeunesse 2020.
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Alma, Le vent se lève, quelle histoire extraordinaire où le merveilleux côtoie le plus sordide, le plus abject des commerces : celui des êtres humains !
Tout au long des pages de ce beau livre à la si belle couverture grâce aux dessins de François Place, j’ai été happé, captivé par le roman de Timothée de Fombelle (photo ci-contre) qui débute au cœur de l’Afrique où Alma et sa famille vivent heureux, coupés du monde par une vallée encaissée pleine d’épineux empêchant tout passage. Mais à chaque saison des pluies, la vallée se remplit d’eau et…
Avec Alma qui a treize ans, j’ai d’abord rencontré son petit frère, Lam, qui a trois ans de moins. Ils ont apprivoisé un zèbre sans rayures : Brouillard, que Lam, instruit par sa sœur, fait galoper. Ils ont un grand frère, Soum, qui ne parle pas et des parents. Nao, leur mère et Mosi, leur père. Il faut préciser que, dans la langue oko, celle du peuple de Nao, Alma veut dire libre.
Il y a vingt-et-un ans, Mosi et Nao étaient deux fugitifs s’installant dans cette vallée isolée qu’ils ont nommée Isaya. Leur maison est en haut d’un arbre avec, tout autour, des oiseaux-mouches, les okos.
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Hélas, cette vie paradisiaque ne dure pas car, l’attrait de l’inconnu est plus fort que toutes les consignes de prudence répétées par Mosi. À ce moment-là, l’histoire admirablement contée par Timothée de Fombelle, bascule dans le drame, l’horreur, la concupiscence, l’appât du gain, le mépris de la vie humaine.
Dans Alma, Le vent se lève, j’ai lu une extraordinaire histoire de l’esclavage, plutôt de la chasse aux captifs, assurée par des hommes de certaines tribus motivés par des cadeaux de pacotille et quelques armes. Ils sont tous Noirs mais ce sont les Blancs, les Européens - Français, Anglais, Néerlandais… - qui commandent et exigent cette chasse aux humains, une des plus grandes hontes de l’humanité.
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Captifs, enchaînés, malmenés, mal nourris, maltraités, ces colonnes d’hommes, de femmes et d’enfants sont acheminés jusqu’à la côte où les attend une épreuve encore plus dure, la traversée jusqu’aux Caraïbes ou en Louisiane. Marqués au fer rouge, fers aux pieds, ils sont entassés à bord et j’ai frémi à chaque page en lisant toutes ces horreurs.
Pendant ce temps, à La Rochelle, un riche armateur tente de continuer à mener à bien ce commerce triangulaire mais doit affronter une soif toujours plus grande pour l’or et la fortune de la part de ses associés.
Sur La Douce Amélie, le trois-mâts commandé par l’infâme et rusé capitaine Gardel, la traversée s’engage mais je ne peux donner davantage de détails sans divulgâcher la lecture de ce roman dit « Jeunesse » que je recommande à tous les adultes car je me suis RÉ-GA-LÉ !
Ah oui ! Je précise que ce bateau destiné au trafic le plus honteux de tous, porte le prénom de la fille de Monsieur Bassac, l’armateur.
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Qu’il est dur de devoir s’arrêter là car l’histoire se poursuivra avec deux tomes à venir. Le prochain, Alma, L’enchanteuse, paraîtra en 2021.
Je ne dois pas oublier enfin les superbes planches qui jalonnent le récit. Elles sont dessinées par Francois Place, dans des tons de gris, tout en finesse. Elles permettent d’imaginer, de visualiser aussi certaines scènes, une aide précieuse pour les lecteurs les plus jeunes. Je remercie On Lit Plus Fort et Gallimard Jeunesse qui m’ont permis cette belle découverte dans le cadre du Tour du monde littéraire.
Jean-Paul
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Alma, le vent se lève par Timothée de Fombelle.
Gallimard Jeunesse (2020) 388 pages.
Prix France Télévision Roman Jeunesse 2020.
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Un roman splendide qui, au départ pourrait être assimilé à un conte. Il pourrait débuter ainsi : Il était une fois, en 1786; en Afrique, dans une vallée souriante et paradisiaque qui s'étendait à perte de vue une famille qui vivait heureuse, en harmonie avec la nature. Nao, la mère et Masi, le père avaient trois enfants, deux garçons, Soum, l'aîné, muet, et Lam et une fille Alma, 13 ans, ce nom signifiant "libre" chez les Okos, la tribu de la mère d'Alma .
Comme on aimerait que cette vie simple et paisible, à l'abri du monde, perdure dans cette vallée fermée et protégée par des falaises ! Mais il n'en sera rien. L’arrivée d’un cheval, ce zèbre sans rayures, "avec ses lunes de fer sous les pieds et son collier de cuir" va bouleverser leurs vies. En effet quand quelques jours plus tard, Alma va s'apercevoir de la disparition de son petit frère parti sur le cheval, n'ayant pu résister à la tentation d'aller voir ailleurs, elle quittera à son tour la vallée pour essayer de le retrouver. Sans le savoir, le reste de sa famille se retrouvera pris dans cette tourmente.
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Au même moment, dans le port de Lisbonne, un jeune garçon, Joseph Mars, à la recherche d'un immense trésor réussit à se faire embaucher sur un navire, "La douce Amélie"*, dirigé par le redoutable Lazare Bartholomée Gardel, dont il apprendra, une fois à bord, qu'il est chargé de la traite des esclaves.
Ces deux destins, celui d'Alma et de Joseph finiront par se rejoindre. leur rencontre modifiera bien des choses.
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Avec Alma, Le vent se lève, premier tome d’une trilogie, Timothée de Fombelle (photo ci-dessus) nous offre un puissant récit d'aventures dans lequel la traite des Noirs, à la fin du XVIIIe siècle, est racontée avec justesse, de façon passionnante mais ô combien bouleversante et émouvante. Impossible de ne pas être révoltée dans la manière dont sont traités ces hommes, ces femmes et ces enfants. Comment des êtres dits humains ont-ils pu traiter leurs semblables ainsi ? Comment ne pas avoir honte de nous ?
La force de cet écrivain a été de traiter ce thème en l’immisçant à de multiples aventures où les rebondissements s'enchaînent. Cela permet au lecteur de prendre sa respiration tout en haletant avec ces histoires de pirates, de manipulations... De plus la poésie est loin d'être absente. En effet, j'ai partagé des moments sublimes avec les membres de cette famille où les regards se suffisent à eux-mêmes pour exprimer tout l'amour qu'ils se portent. Cette nature préservée est magnifiquement ensorcelante, de même que les chants envoûtants de Nao. Les noms d'Isaya pour cette vallée africaine et d'Alma pour cette jeune adolescente signifiant respectivement main et liberté sont à eux seuls tout un symbole.
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Les belles et sobres illustrations de François Place apportent un plus non négligeable, notamment pour des lecteurs plus jeunes.
Un roman extrêmement puissant et addictif, une fiction richement documentée où aventures et réalité historique sont intimement mêlées, voilà le résumé que je fais de ce premier tome, dont j'attends la suite avec une grande impatience. À lire par tous, jeunes et moins jeunes.
*J'ai regretté une seule chose : qu'il n'y ait pas eu une carte pour suivre le parcours de "la douce Amélie".
Ghislaine