Michaël Moslonka : En attendant les vers
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En attendant les vers par Michaël Moslonka.
Le Riffle (2012) 330 pages ; LBS (2021) 389 pages.
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Octobre 2010, Éric Bastien, 41 ans, heureux de faire découvrir sa ville natale à sa femme Élisabeth et à leurs trois filles, après plus de huit cents kilomètres, arrive enfin à Auchel dans le Pas-de-Calais. Il arrête sa voiture devant l’usine de textile désaffectée. Soudain, une voiture se gare tout près. Un homme en descend, qu’Éric, plus qu’étonné en le voyant, appelle Gilbert. Celui-ci se met à l’injurier, puis se saisit d’un manche de pelle et frappe…
Amélie Laribi, quant à elle, est devenue capitaine de police à Auchel, prenant la place de David Blacke avec qui elle faisait équipe, quand ce dernier a été viré pour insubordination. Il avait accepté son sort à la condition que Laribi prenne sa place. Voilà qu’en ce treize octobre, sept mois après, elle se rend justement chez lui avec un bouquet de roses pour le remercier lorsqu’elle est interrompue dans son élan par un coup de fil de l’agent Alexis Picavette : « On vient de découvrir cinq corps devant l’ancienne usine Auchelaine Dewavrin. Toute une famille. Le père, la mère et leurs trois filles. Tous morts. L’homicide volontaire ne ferait aucun doute ».
David Blacke, lui, affalé dans son canapé est en mode autodestruction lente, il attend les vers…
Il va s’avérer dans l’enquête, que Éric Bastien surnommé La Teigne au collège, puis Riton par ses potes appartenait, dans les années 80, à une bande « les sept mercenaires » six garçons tous plus ou moins amoureux de la seule fille du groupe, dont les membres menaient la vie dure aux gens du coin.
Il faut donc creuser la piste… le tueur serait-il un flic comme la scène d’entrée peut nous le laisser supposer ou bien est-ce un des survivants de la bande ?
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Pour raconter cette histoire et identifier le ou les coupables, Michaël Moslonka (photo ci-contre) va devoir faire de nombreux aller-retours entre les années 1985, année charnière dans la vie du groupe de petits voyous et 2010.
Les personnages tels qu’il nous les décrit sont plus vrais que nature. Les surnoms dont sont affublés certains, les qualifient déjà bien.
Avec une écriture riche, imagée et rythmée, toujours juste, l’auteur nous embarque dans ce Nord où les zones commerciales ont remplacé les entreprises, « Le présent est à la consommation. La production, elle, se passe ailleurs ». Il raconte la jeunesse, le mal-être des adolescents en quête de leur identité, leur besoin d’amour, de reconnaissance, le besoin de s’en prendre aux plus faibles pour exister, la difficulté de trouver son chemin. Il évoque aussi le racisme, les conséquences d’un long séjour en prison qui « que vous soyez coupable ou innocent, (elle) vous transforme en bête furieuse ».
C’est un polar endiablé, foisonnant d’originalité, extrêmement bien mené duquel se dégage beaucoup de mélancolie et une certaine noirceur. Cependant l’écrivain a su l’éclairer en y apportant des touches de tendresse et d’humour et en le rythmant par de nombreuses chansons.
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La grande question soulevée par ce magnifique polar est à mon avis celle de savoir ce qu'aurait pu être notre vie, si, à tel moment, nous avions choisi une voie plutôt qu’une autre.
Je trouve que la couverture et le titre sont en complète adéquation avec le contenu du polar.
Je remercie les éditions LBS qui m’ont permis de gagner ce livre et je terminerai sur ces mots que Michaël Moslonka m’a gentiment écrits en dédicace : « Sans le noir du polar, la lumière de l’existence n’aurait pas le même éclat ».
Ghislaine