François Médéline : La sacrifiée du Vercors

La sacrifiée du Vercors      par   François Médéline.

10/18 (2021) 195 pages.

Prix France Bleu : L’Histoire en polar.

 

 

Le Vercors, superbe massif des Préalpes, se profile souvent à l’horizon. Je l’aperçois, le détaille, l’admire par temps clair, dès que je m’élève un peu au-dessus de chez moi. Je l’ai parcouru, escaladé ses cols, pas faciles, à vélo, y ai randonné à pied et j’ai skié souvent sur le plateau des Coulmes, à Presles, au-dessus de Pont-en-Royans, justement là où François Médéline a écrit ce terrible et passionnant roman noir historique : La sacrifiée du Vercors.

 

L’auteur mène intrigue et suspense de remarquable façon, respectant une unité de lieu, d’action et de temps, comme Boileau le préconisait. D’ailleurs, il cite celui qui définit tout cela dans L’Art poétique en fin d’ouvrage, après avoir poussé le luxe de gratifier ses lecteurs de titres de chapitres empruntés à divers poètes comme René Char, René-Guy Cadou, Benjamin Phélisse, Robert Desnos, Édith Thomas, Paul Éluard… ou encore Louis Aragon.

 

 

Tous les événements qui m’ont fait trembler, espérer, qui m’ont permis de revoir ces villages martyrs, se déroulent le lundi 10 septembre 1944 mais, comme le précise justement l’auteur en préambule, la date et les faits sont fictifs.

 

François Médéline (photo ci-dessus) a pris aussi beaucoup de libertés avec ses personnages. Par contre, j’ai beaucoup apprécié la « péroraison » finale qui remet chacun à sa place et tire des conclusions éloquentes que l’auteur fait bien de rappeler.

 

C’est donc au matin de ce 10 septembre 1944 qu’arrive, au volant de sa Peugeot 402, un certain Georges Duroy, commissaire de police près le délégué général à l’épuration. Il vient de Lyon par la route de Villard-de-Lans et il est bloqué par un barrage de maquisards FFI, tous très jeunes. Leur chef a tout juste dix-sept ans. Le laissez-passer du commissaire indique qu’il vient pour le transfert d’une prisonnière, Sarah Ehrlich, dite la baronne.

 

Juste après, je fais connaissance avec l’autre personnage central de ce roman, la journaliste Judith Ashton, une étasunienne travaillant pour Life. Elle n’a qu’un vélo pour se déplacer mais, depuis qu’elle séjourne à Saint-Julien-en-Vercors, elle connaît pas mal de monde. Pourtant, l’armée nazie repoussée vers l’est, elle s’apprête à partir avec tout son matériel photo car elle développe elle-même ses clichés et effectue les tirages sur papier.

 

C’est au QG du Saint-Martin-en-Vercors où la République libre du Vercors a été proclamée le 3 juillet 1944, que Duroy rencontre celui qui se fait appeler Choranche, nom d’une fameuse grotte située pas très loin de Pont-en-Royans. Choranche, commandant du Vercors, lieutenant-colonel FFI, se nomme Ulysse Anselme Wesser d’Alphonse, monte à cheval et porte un sabre au côté.

Photo ci-dessus : Le Mémorial de la Résistance à Vassieux-en-Vercors.

 

Quand tout aurait pu se passer normalement, voilà qu’on apprend que la fille Valette, Marie de son prénom, a été trouvée assassinée, tondue et violée, dans les bois. François Valette, son père, a déjà perdu son fils, André, tué à dix-sept ans par la Milice, alors qu’il avait aidé le premier camp de maquisards, constitué de réfugiés polonais et de réfractaires au STO à s’installer à la ferme d’Ambel, sous le col de la Bataille.

 

Voilà, le décor montagnard est planté avec, dans toutes les mémoires des survivants l’énorme traumatisme de l’attaque allemande et des miliciens français, en juillet, avec massacres et destructions. La baronne Ehrlich que je pensais être l’essentiel du roman, ne sera plus qu’évoquée épisodiquement car tout va s’enchaîner avec règlements de compte, chasse à l’homme, haine des Italiens venus se réfugier dans le Vercors pour fuir la dictature et la misère, avec un rôle essentiel pour Duroy et Judith Ashton.

 

Rythme haletant, style précis et vivant, François Médéline m’a happé complètement, me tenant en haleine jusqu’au bout. Si La sacrifiée du Vercors n’était que cela, ce serait déjà un livre passionnant mais, au fil des pages, l’auteur ne manque pas une occasion de préciser, d’informer son lecteur pour sortir de l’oubli qui s’installe peu à peu, les événements dramatiques qui ont endeuillé ces montagnes, ce plateau. Vassieux (photos ci-dessus) est un village-martyr mais tout le Vercors et ses habitants ont payé très cher leur combat contre l’occupant nazi.

 

Avec La sacrifiée du Vercors, François Médéline qui révèle une information très personnelle en fin d’ouvrage, a réussi une œuvre romanesque, un thriller historique qui m’a beaucoup impressionné, ému, tout en remettant en mémoire ces heures graves et terribles de l’année 1944. J’en remercie bien sincèrement Babelio pour la très intéressante rencontre virtuelle avec l’auteur ainsi que les éditions 10/18.

 

Jean-Paul

 

 

 

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