Céline Bentz : Oublier les fleurs sauvages
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Oublier les fleurs sauvages par Céline Bentz.
Éditions Préludes (2021) 346 pages.
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Librement inspiré de son histoire familiale, Oublier les fleurs sauvages, premier roman de Céline Bentz nous conte le destin hors du commun d’une jeune femme, Amal, qui va se trouver déchirée entre deux pays. C’est également une plongée très intéressante dans le Liban des années 1980.
L’histoire débute l’été 1984 avec Amal qui vient de terminer sa première au lycée public de Saïda. Elle est la quatrième fille d’une fratrie de sept enfants et vit dans le petit appartement misérable situé à côté de la bananeraie la plus étendue de la ville, les aînés étant partis. Elle est issue d’une famille modeste, mais ses parents Dibba et Ahmad Haddad, bien que limités par leur illettrisme, tiennent à donner à leurs enfants la chance qu’ils n’avaient pas eue et à préserver leur scolarité à tout prix.
Invitée par Abbas, le plus âgé de ses frères, marié à une Française et vivant en Lorraine, à Nancy avec leurs deux enfants, pour venir y étudier, Amal est immédiatement séduite par la proposition et ne rêve plus qu’à ce départ.
Durant cet été, pourtant, elle rencontre Youssef, un beau jeune homme aux yeux vairons, un homme qu’elle n’a pas le droit d’aimer, car il est maronite et elle est sunnite (Les maronites étant les chrétiens catholiques orientaux et les sunnites, le principal courant religieux de l’islam)…
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Ayant réussi à se faire admettre en filière scientifique, son vœu étant de devenir pédiatre, elle réussit son Bac en juin 1985. Un autre été au Liban et c’est le départ vers la France.
« Ce qu’il lui revenait de faire était immense, en traçant son chemin, elle devait relever la dignité bafouée des siens et leur prouver enfin que leurs batailles n’avaient pas été vaines, qu’ils n’avaient pas vécu pour rien ».
Ce récit extrêmement touchant nous fait effleurer les blessures éprouvées par ce peuple libanais qui tente de vivre malgré les guerres fratricides qui dévastent le pays, ces guerres qui ont conduit à l'effondrement de la classe moyenne et à une forte paupérisation de la population, ont contraint une partie de la bourgeoisie à l’exil, privant ainsi le pays de ressources humaines et financières importantes. Céline Bentz (photo ci-dessous) décrit bien la tension entre les différentes communautés de ce pays où les infrastructures ont été fortement endommagées. Je dois dire que j’ai eu souvent du mal à comprendre tous les tenants et aboutissants de cette guerre très complexe où se mêlent aspects politiques, religieux mais aussi quasi-mafieux.
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Le Liban malheureusement en proie à la guerre civile depuis de nombreuses années avec certes, quelques périodes d’accalmie est un pays riche en traditions où la cuisine a une grande place et le talent de l’auteure a été d’intégrer la beauté des paysages à la noirceur de la guerre et à juxtaposer la pauvreté de la majorité à la richesse d’une élite.
Quoi de plus naturel donc, pour cette jeune fille intelligente tout en étant éperdument reconnaissante à ses parents pour les efforts qu’ils ont fait et font pour elle, que d’être tentée par cette liberté qui s’offre à elle, même si elle découvre bien vite le goût amer que recèle l’exil.
Mais son prénom Amal, signifiant Espoir ne lui assigne-t-il pas « cette mission sacrée et intimidante » qu’elle était née pour les racheter ?
Oublier les fleurs sauvages est un roman remarquable et très instructif sur le Liban et l’exil « ce prodigieux écartèlement entre deux langues, deux cultures, deux aires géographiques et deux appartenances ».
Merci à Babelio et aux éditions Préludes pour la découverte de ce roman à la belle couverture !
Ghislaine
