IV. Correspondances de Manosque 2021

IV. Correspondances de Manosque 2021.

 

23e édition : Parrainée par Emmanuel Guibert.

 

Samedi 25 septembre

 

« Le monde de Proust » : Avant-première au cinéma CGR :

 

 

Cela devient une habitude. Comme l’année dernière pour « Jean Giono, une âme forte », nous revoici dans la belle salle du cinéma CGR de Manosque pour une nouvelle projection en avant-première. Cette fois, le film est dédié à un autre grand de notre littérature, certains prétendent que c’est le plus grand : Marcel Proust.

 

Le Monde de Proust est un film (52 mn) de Thierry Thomas (photo ci-dessus) qui sera projeté sur Arte prochainement. C’est un documentaire très vivant, très bien fait, mêlant images d’archives réelles avec Marcel Proust (1871 – 1922) et beaucoup d’autres clichés et films de ce qui fut appelé, la Belle époque.

 

Thierry Thomas, le réalisateur, est présent dans la salle pour répondre ensuite aux questions mais il y a aussi Pierre Baux, le comédien que nous retrouverons le soir sur la scène du théâtre Jean-le-Bleu pour « Albert Camus en toutes lettres ». Dans Le Monde de Proust, c’est lui qui dit le texte qui s’affiche en même temps sur l’écran.

 

 

Surtout, nous avons bien apprécié, dans ce film, le témoignage de Céleste Albaret (1891 – 1984). Elle était l’épouse du chauffeur du grand écrivain puis fut sa gouvernante et l’assista jour et nuit jusqu’à sa mort.

 

 

Lozérienne d’origine, Céleste Albaret (photo ci-contre) apporte un éclairage précieux et éloquent sur les dernières années de Marcel Proust et sur son génie littéraire alors que, sur l’écran, nous voyons défiler le texte écrit par la main de l’auteur, comme si cela se produisait en direct. Impressionnant !

 

 

Jean-Baptiste Del Amo, Le Fils de l’homme

et Dan Nisand, Les Garçons de la cité jardin :

Cela faisait déjà cinq ans, depuis Règne animal en 2016, que nous avions été conquis par Jean-Baptiste Del Amo (photo ci-dessous), ici-même, à Manosque. Bien qu’ayant déjà lu son dernier roman, Le Fils de l’homme, nous étions impatients de retrouver cet auteur talentueux afin d’entendre ses commentaires, en répondant aux questions de Sophie Joubert, place Marcel Pagnol, sur un livre qui nous a marqués.

 

Pour l’auteur, Le Fils de l’homme a été imaginé dans la suite de Règne animal. Ce sont les Pyrénées ariégeoises qu’il connaît bien qui lui ont inspiré cette histoire d’emprise où la nature est omniprésente et dans laquelle il aime nommer exactement insectes et plantes. Quant au prologue, c’est le corps du roman qui va lui répondre. Si la fin est ouverte, le narrateur s’exprime du point de vue de l’enfant, un enfant construit dans l’environnement de sa mère mais qui attend des liens nouveaux avec cet homme, son père. Alors, pas besoin de prénoms dans un récit où peur et tension ne cessent d’augmenter.

 

Pour Dan Nisand, c’est une découverte car, avec Les Garçons de la cité jardin, il publie son premier roman. S’il s’est inspiré de la cité-jardin de Strasbourg, il a situé son récit près de Mulhouse.

 

 

Là où il ne devrait y avoir que de l’amour, la violence aussi prend toute sa place, hélas. Dan Nisand (photo ci-contre) a pris beaucoup de plaisir à nommer ses personnages comme Melvil, ses frères et ses copains. Alors qu’il se demande ce qui se passe dans la tête de son père refermé sur lui-même, le retour de Virgile, son frère, est très important pour Melvil qui l’attendait depuis neuf ans.

 

Alain Guiraudie, Rabalaïre :

Ce cinéaste au délicieux accent aveyronnais en est à son deuxième roman avec ce Rabalaïre, un homme qui sort des sentiers battus, sorte de vagabond. Alain Guiraudie écrit avec un style direct, normal, comme il parle. Il avoue à Régis Pénalva qui l’interroge, place de l’Hôtel de Ville, avoir une écriture libérée.

 

S’il aime raconter des histoires au cinéma, écrire des scénarios, il se régale aussi en nous emmenant sur les traces de Jacques qui cherche du travail mais pas tout de suite, entre Montpellier, Clermont-Ferrand et Toulouse. Alors, il quitte son village pour aller vivre à Gogueluse, à 60 km de chez lui. Il est désenchanté, n’aime plus les autres mais reste lucide jusqu’à cette rencontre avec ce curé qui couche avec ses paroissiens… Alors que chacun peut se faire son film, Alain Guiraudie ajoute une très juste remarque sur notre mort inéluctable qui permet de laisser la place à ceux qui viennent tout en assurant, on l’espère, l’immortalité de l’espèce…

 

 

 

Philippe Jaenada, Au printemps des monstres :

C’est aussi un plaisir de retrouver Philippe Jaenada ! Après avoir été conquis par La petite femelle et La serpe, voici Au printemps des monstres dont Ghislaine vous a déjà parlé sur notre blog.

 

Au micro d’Élodie Karaki, Philippe Jaenada explique que ce fut une longue enquête : quatre ans de recherches et deux ans d’écriture pour tenter d’y voir plus clair dans l’histoire de Lucien Léger, un homme libéré après avoir passé quarante-et-un ans en prison. L’auteur dédie son livre à Jean-Louis Ivani et Stéphane Troplain qui ont publié, en 2012, un livre très documenté sur cette affaire : Le Voleur de crimes.

 

Philippe Jaenada reprend tout, à partir de 1964, quand Luc Taron (11 ans) est découvert assassiné. Un inconnu envoie alors une lettre anonyme, s’accuse, signe « L’étrangleur », écrit aux parents, à la presse, à la télé, à la police et se fait arrêter quarante jours après. C’est un infirmier de Villejuif, Lucien Léger. Il avoue, se rétracte et, finalement, il est condamné à perpétuité, sans preuves et sans mobile, ses avocats ne sachant pas sur quel pied danser. Précision importante, c’est Solange, la femme de Lucien Léger, qui est représentée sur la couverture du livre.  Personne intelligente, drôle, sensible, Philippe Jaenada l’affirme : « Elle a sauvé mon travail d’écriture. »

Bien sûr, il y a des digressions comme Philippe Jaenada (photo ci-contre) sait bien le faire mais cela permet de respirer, donne du rythme et allège la lecture d’un livre à lire absolument ! Ghislaine, tellement impressionnée par ce roman, a demandé à l’auteur s’il était sorti indemne de l’écriture de Au printemps des monstres. La réponse a été claire : « On n’en sort pas indemne. J’étais effondré. Moralement, on n’en sort pas et j’y pense tout le temps. » En effet, il le confirme, « la vérité judiciaire » est souvent fausse.

 

Pierre Baux et Mahut : Albert Camus en toutes lettres (lecture musicale) :

 

Revoilà le fameux narrateur du film de Thierry Thomas « Le monde de Proust », Pierre Baux !

 

Cette fois-ci (merci à Télérama), il prête sa voix à Albert Camus et débute sans délai par son fameux discours prononcé à Stockholm, en 1957, lors de la remise de son fameux Prix Nobel de littérature. Impossible de ne pas citer les premières phrases : « L’art n’est pas à mes yeux une réjouissance solitaire. Il est un moyen d’émouvoir le plus grand nombre d’hommes en leur offrant une image privilégiée des souffrances et des joies communes. »

 

 

Comme pour Bernard Lavilliers, Dominique Mahut fait entendre sa musique magique, planante, envoûtante qui ne perturbe en rien l’audition de textes si bien dits, de lettres d’Albert Camus à son ami Louis Guilloux et, en point d’orgue : Noces à Tipasa. Pierre Baux, acteur et metteur en scène, est sobre, efficace, laissant toute la place à la beauté des textes qu’il nous communique.

 

Photo ci-dessous : Mahut et Pierre Baux.

 

Ghislaine et Jean-Paul

 

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