Malik Sam : Seul le mensonge est vrai

Seul le mensonge est vrai     par    Malik Sam.

Éditions Eyrolles (2024) 362 pages.

Rentrée littéraire janvier 2024.

 

 

 

 

Seul le mensonge est vrai, premier roman de Malik Sam, m’a emporté sur les pas de Nour, au contact de l’horreur et de la violence dont sont victimes les migrants et plus particulièrement les femmes.

 

 

 

Avec justesse et sans fioritures, l’auteur détaille le rôle des passeurs, ces hommes qui, au mépris de toute humanité, pour gagner toujours plus d’argent et assouvir leurs plus bas instincts, menacent, violent, torturent, séquestrent et tuent sans le moindre état d’âme.

 

 

 

C’est justement dans le camp de Choucha, au sud-est de la Tunisie,  que se retrouve Nour, sauvée de justesse par un hélicoptère de l’armée nigérienne, en plein désert du Ténéré. Nour Rassool vient de Ouidah, au Bénin. Son  histoire, pleine de drames, se révèlera tout au long du livre.

 

 

La vie dans le camp est difficilement imaginable mais, grâce à Nour et à son amie Loubna, je me rends un peu plus compte des souffrances imposées à ces enfants, à ces femmes et à ces hommes qui n’ont qu’un projet, traverser la Méditerranée pour venir vivre en Europe.

 

Photo ci-dessus : Camp de Choucha (Tunisie).

 

Seulement, avant de se heurter à nos lois de plus en plus sévères pour plaire à l’extrême-droite, tous ces gens doivent affronter un terrible parcours plein d’embûches et de pièges tendus par les passeurs. Ces migrants sont partis de chez eux en emportant tout l’argent mis de côté. Quand c’est le moment, ils sont prêts à faire confiance à n’importe qui.

 

 

Ces passeurs regroupés en mafias, surarmés, drogués au maximum, sont même acoquinés avec l’armée libyenne pour qu’elle arrête ceux qui ont réussi à embarquer sur des canots pneumatiques. Les guerres civiles, les révolutions avortées ou non, sur le continent africain, favorisent ce monumental gâchis.

 

 

À cela, s’ajoute le drame vécu par ces enfants nés dans un corps de garçon et se vivant comme fille. Répudiés, chassés, assassinés dans les pires souffrances, ils n’ont qu’une seule solution : fuir.

 

 

C’est là que Seul le mensonge est vrai si Nour ne veut pas sombrer dans cet abominable trafic de réfugiés. Pour  pouvoir embarquer, il faut des papiers et d’abord être soigné par le docteur Andréa de Médecins Sans Frontières (MSF) œuvrant au sein du HCR (Agence des Nations Unies pour les Réfugiés).

 

 

Que de souffrances ! Quelle honte ! L’île de Lampedusa, à trois cents kilomètres de la côte, représente un mirage, un espoir fou. Combien de migrants ont fini leur vie dans ce qui est devenu un véritable cimetière marin ! Quand une famille dont le père est chirurgien, part en toute confiance, Nour ne peut pas oublier le dernier regard de l’enfant s’en allant plein d’espoir…

 

 

Nour n’a que seize ans au début du livre. Elle pense sans cesse à Rhonda, sa sœur, et à Nanney, sa grand-mère, préférant oublier un père couard et une mère très violente. En pensant à celles qui l’aimaient, elle trouve la force de continuer tout en subissant les pires sévices, ne faisant pas toujours les meilleurs choix, préférant s’intégrer au système pour survivre.

 

 

Les face à face sont terribles. L’ambiance est souvent insoutenable mais, Malik Sam conduit parfaitement son récit en me happant jusqu’à la dernière ligne. Heureusement, le jardin de l’oasis de Tamaghza (photo ci-dessous) m’offre une respiration salutaire après des scènes d’une brutalité, d’une bestialité, d’une violence abjectes.

 

 

Cela nous oblige à poser les vraies questions au sujet des migrants, de leur exploitation scandaleuse par les passeurs, puis de leur accueil en Europe. Malik Sam, avec Seul le mensonge est vrai, nous permet d’ouvrir les yeux sur de nombreux problèmes qui n’ont pas fini d’agiter notre monde. Ainsi, il vaut mieux savoir avant d’énoncer des vérités toutes faites car Seul le mensonge est vrai, phrase attribuée à Khayan (portrait ci-dessous), poète, mathématicien, philosophe et astronome persan (1048-1131).

 

 

 

 

Je remercie Babelio et les éditions Eyrolles, collection Aparté, pour cette lecture qui va me marquer longtemps.

 

Jean-Paul

 

 

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