Marc Voltenauer : Cendres ardentes
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Cendres ardentes par Marc Voltenauer.
Slatkine & Cie (2023) 379 pages.
Pocket (2024) 504 pages.
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Avec Cendres ardentes, l’auteur genevois Marc Voltenauer signe son cinquième polar pour adultes et quel polar !
Tout commence sur la plage de la Maladaire, (photo ci-dessous) avec la découverte par une nageuse matinale, d’un sac poubelle à moitié immergé dans les eaux du Léman. Le sac contient la dépouille noir-verdâtre d’un tronc humain sans bras ni jambes et dont manque la tête. Elle sera suivie par d’autres découvertes tout aussi sordides.
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L’inspecteur Andreas Auer et son équipe est chargé de l’affaire.
En parallèle, nous suivons la famille Hoti dont une partie a fui l’Albanie au temps de la dictature d’Enver Hoxha pour s’installer en Suisse et découvrons que Mirjan Hoti, revenu au Montenegro pour enterrer sa femme a été victime de la gjakmarrja, cette vendetta albanaise qui n’a pas de limite dans le temps et qui peut se perpétuer et entraîner un cycle de vengeances sur plusieurs générations.
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L’inspecteur enquête également sur la disparition de ce chef de famille albanais.
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Suite à ce meurtre, Sokol Hoti, le frère de Mirjan, venu de Tirana (photo ci-dessus), arrive en Suisse à Bex (photo ci-dessous) pour une réunion familiale dont l’objet est la réponse à apporter à cet assassinat.
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C’est alors que nous découvrons ce Kanun, cette coutume albanaise qui consiste à laver le sang par le sang,,, ou par un pardon magnanime qui peut être accordé par la famille de la victime.
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Si Sokol est partisan de cette dernière solution, Skendër, son neveu, devenu un baron de la drogue, n’a qu’un souhait, venger la mort de Mirjan, et ce, contre l’avis de Sokol et de la famille.
Comme on peut le deviner, les deux enquêtes vont finir par se rejoindre.
Dans ce nouvel ouvrage, Marc Voltenauer nous embarque donc dans une histoire entre l’Albanie et la Suisse, sur les pas de cette communauté albanaise importante en Suisse et en majorité repliée sur la famille, nous faisant découvrir le tiraillement culturel existant entre les différentes générations.
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Pour ma part, j’ai énormément appris sur l’histoire de ce petit pays encore enfoncé dans l’isolement et la répression il y a peu, sur la Sigurimi, la Direction de la sûreté de l’État (photo ci-dessous), qui se servait d’indics volontaires ou recrutés de force pour surveiller les « ennemis intérieurs », sur ce fameux Kanun, cette coutume médiévale à laquelle se réfèrent encore certains clans des territoires albanais et également sur les mœurs et rites de ce pays comme l’existence des burrnesha, ces vierges sous serment ou vierges jurées, qui font vœu de chasteté et portent uniquement des vêtements masculins. En contrepartie de ce vœu, elles bénéficient de nombreux avantages traditionnellement réservés aux hommes. Lors de son séjour en Albanie, la rencontre avec l’une des dernières burrnesha de ce pays a d’ailleurs inspiré l’auteur pour le personnage de Lali…
Photo ci-dessus : Enver Hoxha, à Tirana, le 28 décembre 1976. après l'adoption de la nouvelle constitution albanaise.
Ces richissimes et fascinantes informations, Marc Voltenauer les a savamment, adroitement et très naturellement incorporées dans son enquête.
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Par contre, les renseignements transmis par Doc et sa collègue légiste sur les autopsies, s’ils m’ont, dans un premier temps, fort intéressée et époustouflée par leur précision, m’ont ensuite vite paru un peu fastidieux mais il est évident que cette science forensique s’avère très utile dans des enquêtes de ce type.
Photo ci-dessus : Le Monténégro.
Même si je m’en doutais un peu, j’ai tout de même été surprise et horrifiée d’apprendre que le trafic d’organes était un marché en pleine expansion, ce commerce illégal d'organes fort juteux financièrement, visant particulièrement les populations vulnérables et pauvres.
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Comme dans les autres polars de Marc Voltenauer (Le Dragon du Muveran, Qui a tué Heidi ?, L’Aigle de sang, Les protégés de Sainte Kinga) la religion a un rôle très prégnant qui pourrait l’être trop, si elle n’était pas utilisée pour promouvoir la tolérance et la bienveillance dans un monde où les hommes sont capables de telles atrocités.
Avec pour thème, l’histoire méconnue de cette importante diaspora albanaise en Suisse, Marc Voltenauer (photo ci-dessous) nous offre dans Cendres ardentes une enquête palpitante et passionnante d’une force dramatique incontestable qui nous emmène vraiment au bout de l’horreur et dans laquelle le suspense est maintenu jusqu’au bout.
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Je remercie sincèrement Marc Voltenauer qui, à son habitude, manie avec talent l’art du polar ainsi que les éditions Slatkine & Cie pour cette lecture captivante et instructive.
Ghislaine