Morgan Audic : Personne ne meurt à Longyearbyen
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Personne ne meurt à Longyearbyen par Morgan Audic.
Albin Michel (2023) 374 pages.
Prix des Lecteurs « Quai du Polar » 2024.
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Personne ne meurt à Longyearbyen est à la fois un roman et un polar mais c’est surtout un cri d’alarme pour dénoncer le trafic des mammifères marins. Leur utilisation à des fins militaires et commerciales est un scandale comme cette chasse ne respectant pas les quotas imposés à grand peine par les ONG tentant de préserver la faune sauvage tout en nous alertant sur les conséquences désastreuses du réchauffement climatique.
Morgan Audic, avec beaucoup de talent, m’emmène donc à Longyearbyen, la dernière ville avant le pôle nord où trois cents ours vivent comme trois mille habitants, sur l’archipel de Svalbard.
Commence alors une double enquête passionnante allant de rebondissement en surprise sans masquer la tristesse infinie causée par deux jeunes vies sacrifiées. Pour qui ? Pour quoi ? Pour le savoir, il faudra aller au bout de Personne ne meurt à Longyearbyen, Prix des Lecteurs « Quai du Polar » 2024, récompense amplement méritée.
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Il s’agit d’abord d’Agneta Sørensen (26 ans), de Tromsø, titulaire d’un doctorat en biologie arctique à l’UNIS, l’université de Svalbard (photo ci-dessous). Son cadavre, en partie dévoré par un ours, a été retrouvé près de la carcasse d’un cachalot. Lottie Sandvig, jeune policière, mène l’enquête mais ses crises d’angoisse paralysent parfois son action.
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Au passage, Morgan Audic n’hésite pas à détailler certaines traditions nordiques et c’est un vrai dépaysement au contact des habitants de ces contrées privées de soleil plusieurs mois par an.
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Photo ci-dessus : Longyearbyen.
À Svalbard, sur le site de Pyramiden, la Russie exploitait un gisement de charbon jusqu’en 1998 mais les Russes ont gardé un pied dans la place et cela aura une importance par la suite.
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Un peu plus au sud, sur les fameuses îles Lofoten (photos ci-dessus et ci-dessous), Nils Madsen, journaliste, apprend que le corps de son amie, Åsa Hagen a été retrouvé sous un pont : noyade, suicide, accident ? Nils et Åsa ayant un passé au Moyen-Orient et en Ukraine, au cœur de conflits sanglants qui perdurent, lui étant journaliste et elle photographe, il ne veut pas croire à la thèse du suicide qui semble bien arranger tout le monde.
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Les deux enquêtes menées de manière différente risquent de se rejoindre mais comment ? Åsa s’était reconvertie en créant Nordland Safari pour emmener les touristes observer baleines et dauphins et, bien sûr, elle s’oppose aux chasseurs comme Ólafur Gunarssonn dont le fils, Sven, ne se fait pas remarquer par son tact.
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Dans cette tension extrême qui va crescendo, Morgan Audic (photo ci-dessous) glisse heureusement quelques moments de tendresse comme cette scène familiale chaude et réconfortante entre Lottie et Lena, sa fille, qu’elle doit partager avec Jakob, le père, qui vit à Tromsø.
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De son côté, Madsen se confronte à Lars, le mari d’Agneta, dont l’agressivité n’empêche pas une émouvante discussion pleine de sincérité. Comme Agneta étudiait l’impact des activités humaines sur les mammifères marins dans l’Arctique, elle dérangeait beaucoup certaines habitudes ou traditions.
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Le décor étant planté, j’apprécie au passage un très intéressant commentaire de Frida, biologiste, à propos des ours, de leur comportement envers les humains. Pour ce qui concerne les bélugas ou baleines blanches qui vivent dans l’océan Arctique, comme pour tous les mammifères marins, leur communication est essentiellement sonore. C’est pourquoi l’activité humaine qui propage quantité de bruits polluant l’univers marin, cause tant d’échouages sur les plages. C’est en tout cas une explication trop souvent mise de côté car la recherche de pétrole en mer par canons acoustiques perturbe terriblement les cétacés.
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Ainsi, Personne de ne meurt à Longyearbyen, titre emprunté à une solide rumeur vivace sur l’archipel, alterne scènes haletantes, suspense terrible et renseignements très intéressants sur la vie dans ces contrées nordiques tout en nous alertant sur le sort que nous réservons à la vie sous-marine.
Jean-Paul