Éric Chacour : Ce que je sais de toi

Ce que je sais de toi    par   Éric Chacour.

Philippe Rey (2023) 299 pages.

Prix Femina des Lycéens 2023.

 

Ce que je sais de toi, d’Éric Chacour (photo ci-dessous), se déroule entre 1961 et 2001 entre l’Égypte et le Canada.

 

 

C’est l’histoire de Tarek, ce jeune garçon dont la carrière est déjà toute tracée : son père est médecin, il sera médecin.

 

 

 

Il reprend le cabinet médical de son père à Dokki, quartier résidentiel et calme de la ville du Caire. Ne se sentant pas vraiment à sa place, il offre également, hebdomadairement, ses soins aux habitants du Moqattam, sorte de colline en bordure du Caire, dans un dispensaire bâti à son initiative, s’appliquant à soigner ces pauvres gens que sont les Zabbalines, des chiffonniers ou plutôt des recycleurs vivant sur ce tas d’ordures.

 

 

 

Il se marie, mène une vie paisible entre ses patients et sa famille jusqu’au jour où il fait la connaissance d’Ali.

 

 

 

Ali est ce jeune homme qui, un soir, est venu l’attendre au dispensaire pour qu’il vienne soigner sa mère. Cette rencontre va complètement chambouler sa vie et changer sa destinée.

 

 

Éric Chacour nous offre une superbe description du Caire aussi bien par ses images que par ses odeurs. Il nous fait voyager dans cette Égypte des années 1980, évoque le climat politique de l’époque et fait découvrir cette société cairote avec ses différents milieux.

Avec les parents de Tarek, il nous ouvre la porte de la communauté levantine des francophones plutôt chrétiens alors que la famille de Mira, son épouse, de condition plus modeste, fait partie de la troisième et dernière vague d’Arméniens ayant immigré en Égypte.

 

 

Et puis il y a ce quartier du Moqattam (photo ci-dessus), véritable décharge à ciel ouvert situé sur les collines de la capitale avec ses pauvres et ses sans grade.

 

 

Comme on peut s’en douter dès le premier baiser, vivre son homosexualité dans l’Égypte des années 1980 peut s’avérer très compliqué et le devient encore davantage quand l’hypocrisie des hommes s’en mêle...

 

 

Ce que je sais de toi, magnifique histoire d’amour, toute en délicatesse, se présente au départ un peu comme une énigme, car on ne sait pas qui est le narrateur, si ce n’est que ce n’est pas Tarek qui raconte son histoire puisqu’il use du « tu ». Il révélera son identité dans la deuxième partie du roman, en utilisant cette fois le « je » pour finir par le « nous » dans une troisième et dernière partie – une narration originale.

 

 

J’ai été emportée par la beauté de l’écriture d’Éric Chacour, une écriture très travaillée, ciselée, précise, sensible, sensuelle pleine de délicatesse, de poésie et parsemée d’humour.

 

 

Le travail sur la psychologie des personnages, leur rôle et leur interaction est admirable et les rend très présents et j’ai trouvé particulièrement réussis les portraits féminins, que ce soit celui de la mère de Tarek, de sa sœur Nesrine, de l’indispensable et incroyable Fatheya ou encore de Mira, l’épouse assez mystérieuse. D’ailleurs le narrateur ne joue-t-il pas à la nommer d’une multitude de qualificatifs, Mirasthénie, Mira-Télépathe, Mira-Diaphane, Mira- Déflagration…

 

 

Ce que je sais de toi, premier roman d'Éric Chacour est un roman d’amour, de combat, de filiation, de recherche de soi, un entrecroisement de situations, de lieux, de générations, absolument remarquable et bouleversant, et qui ne peut se lâcher une fois les premières lignes lues…

 

 

Je dois encore féliciter ma médiathèque pour avoir su extraire des publications 2023 ce roman afin de le proposer dans le Prix des lecteurs des 2 rives 2024, un choix fort judicieux.

 

Ghislaine

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A
Je n'avais pas adhéré à ce roman : trop de clichés.
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D
je n'ai pas encore écrit ma chronique alors je te lirais après l'avoir fait, mais un roman que j'ai vraiment beaucoup aimé. pour avoir travaillé 3 mois au Caire en 1998, j'ai eu l'impression de m'y retrouver
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