Fabrice Arfi : La troisième vie
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La troisième vie par Fabrice Arfi.
Seuil (2024) 231 pages.
Rentrée littéraire 2024.
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La troisième vie, cette vie secrète que certaines personnes choisissent de vivre ou qui la subissent malgré elles, voilà un sujet bien intriguant. C’est sur ce thème que Fabrice Arfi se lance pour tenter d’élucider un mystère qui va le conduire dans les plus hautes sphères de notre République française.
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Avant de mener des recherches acharnées dans plusieurs archives nationales, départementales, communales et même privées, l’auteur a la bonne idée de nous remettre en mémoire l’assassinat de Sadi Carnot, le 25 juin 1894, à Lyon (Document ci-dessus). De nombreuses artères de nos cités rappellent son nom mais qui se souvient que cet homme était Président de la République de 1887 à sa mort ?
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Il venait à Lyon inaugurer l’Exposition universelle, internationale et coloniale, au Parc de la Tête d’Or. C’est un anarchiste italien, Geronimo Caserio (document ci-contre), qui l’a blessé mortellement en pleine rue. Cela déclencha une terrible vague de haine raciste envers tout ce qui était italien dans notre pays.
Ce rappel historique intéressant permet d’ancrer La troisième vie dans la métropole lyonnaise, à Villeurbanne (photo ci-dessous) surtout.
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Un certain Hubert, ami du père de l’auteur, le lance sur la piste de Jean Benedetto venu vivre à Lyon avec sa famille, en 1919. Ouvrier dans le bâtiment comme beaucoup de ses compatriotes, il a deux sœurs et un frère disparu, mort à la guerre. Mais, coup de théâtre, ce frère aîné ne serait pas décédé et vivrait en Roumanie, du côté de Cluj.
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Sans hésiter, Jean part là-bas pour tenter de retrouver ce frère. Patience, au passage, Fabrice Arfi (photo ci-dessous), journaliste co-responsable des enquêtes à Mediapart, raconte les douze batailles d’Isonzo (photo ci-dessus) puisque ce serait au cours de ce carnage du niveau de Verdun chez nous, mais jamais rappelé ici, que Benedetto senior aurait trouvé la mort.
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On le voit, l’auteur raconte beaucoup de choses ignorées ou oubliées et cela se complique rapidement, surtout que, fin janvier 1969, Jean a 69 ans et que son frère aurait 75 ans. Le rideau de fer est en place et la Roumanie, depuis quatre ans, est sous la coupe du « génie des Carpates », Nicolae Ceaușescu (photo ci-dessous).
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À Cluj, c’est Vincenzo Benedetto, le fils du frère aîné, mort, qui le reçoit. C’est un certain Angelo Scapini qui a rendu la rencontre possible. À partir de là, Fabrice Arfi analyse la situation roumaine, se souvient de la chute du couple Ceaușescu, en direct à la télévision, alors qu’il n’avait que 8 ans. Beaucoup de liens unissent la France à la Roumanie mais que de choses curieuses à élucider ! En effet, un peu plus tard, Vincenzo et son épouse réussissent à venir vivre et travailler en France, à Villeurbanne.
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L’enquête menée par Fabrice Arfi est de plus en plus intéressante car elle évoque des années pas si lointaines et d’importantes implications politiques avec un certain Charles Hernu (au centre sur les photos ci-dessus et ci-dessous) qui fut maire de Villeurbanne, député et surtout Ministre de la Défense pendant plus de quatre ans sous la présidence de François Mitterrand.
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L’auteur cite bien sûr ses sources, parle de la DST, les services secrets français, et tente de prouver que Vincenzo Benedetto était bien un agent secret. Grâce à une progression remarquable dans le récit, Fabrice Arfi jette toutes les bases avant de revenir en arrière pour détailler certains points. Il retrace surtout le parcours de Charles Hernu, délaisse les services secrets roumains pour notre DST et l’énorme fiasco du Rainbow Warrior dont Hernu est tenu pour responsable malgré toutes les dénégations officielles. Ainsi, les dessous peu reluisants du monde politiques ressortent et ne rassurent pas.
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La troisième vie est un livre-enquête illustré par quelques documents et des photos représentant des personnages importants de cette histoire. C’est passionnant, très bien conduit ; il faut le lire pour éclaircir des épisodes récents et pour tenter de comprendre ce qui se joue au plus haut niveau malgré les versions officielles, des mensonges bien construits pour berner le peuple, un peuple qui ne peut que s’instruire grâce à un livre comme La troisième vie que j’ai pu lire grâce à Babelio et les éditions du Seuil que je remercie.
Jean-Paul