III. Correspondances de Manosque 2024

III. Correspondances de Manosque 2024

26ème édition

Vendredi 27 septembre.

 

 

Cette troisième journée ne semble pas trop chargée pour nous car nous ne débutons qu’à 15 h mais ce qui nous attend en fin d’après-midi nous intrigue et attise notre curiosité : Le club des critiques de la NRF. Sont annoncés : Maylis de Kerangal, Alice Zeniter, Xabi Molia et Jérôme Ferrari, ensemble, sur la même scène !

Alors, patience et découvrons d’abord deux jeunes écrivains.

 

Eliot Ruffel : Après ça (L’Olivier)

Anatole Edouard Nicolo : À l’ombre des choses (Calmann-Lévy)

 

 

Salomé Kiner accueille donc deux auteurs qui publient leur premier roman.

 

Eliot Ruffel (photo ci-contre) est stéphanois. Dans Après ça, il s’attache à la masculinité avec un jeune homme éprouvé par les traumatismes de l’enfance. Max et Lou sont amis et ont tous les deux un père violent mais celui de Lou fait porter sa violence sur son épouse.

 

 

Quant à Max, son père ne se contrôle plus quand on parle football. Celui-ci soutient un club riverain de la Méditerranée alors que celui-là préfère celui de la capitale. Pour essayer d’envenimer encore plus la situation, pour provoquer le père de son ami, Lou offre à Max un tee-shirt, un maillot de son club favori, celui haï par son père. Cela va bien sûr plus loin qu’une histoire de supporters car les deux amis ont besoin de trouver leur place dans la vie.

 

L’auteur parle de sensorialité, de hiérarchie entre les hommes et, heureusement, d’amitié et de fraternité, même si un deuil permet de poser beaucoup de questions.

 

De son côté, Anatole Edouard Nicolo (photo ci-contre), dans À l’ombre des choses, joue avec ses personnages mais, avant tout, dédie son premier roman à son père décédé. Son roman social s’adresse à tous les enfants de province qui ont envie de s’exprimer. Pour lui, il faut mettre de la poésie sur ces vies difficiles, pour ces jeunes qui rêvent d’ailleurs.

 

Avec beaucoup de pudeur, de barrières, de protections, Anatole, son personnage principal qui porte le même prénom que l’auteur, tente d’échapper à la monotonie de sa ville et, comme beaucoup de jeunes, cherche une échappatoire dans le football, ce qui le rapproche de son père.

 

Il y a aussi et surtout G. son grand frère, rappeur célèbre qui fait connaître la famille, la met en lumière. Si, au début, c’est magique pour le petit, cela le maintient hélas dans l’ombre. Alors, Anatole se réfugie dans le mensonge comme nous le confie l’auteur : « Le mensonge faisait partie de mon enfance. » Il ajoute même qu’il nous offre des « mensonges vrais »….

 

Julia Deck : Ann d’Angleterre (Seuil)

Hélène Gaudy : Archipels (L’Olivier)

 

 

C’est maintenant Élodie Karaki, sur scène, avec deux autrices déjà confirmées succédant à deux jeunes hommes qui tentent de se faire une place dans le monde littéraire.

 

Julia Deck (photo ci-contre) est née à Paris d’un père français et d’une mère britannique. Celle-ci, victime d’un AVC, pousse l’autrice à chercher à en savoir plus sur sa famille anglaise car elle trouve que les choses s’emboîtent mal. La recherche n’est pas facile car les documents qui l’aideraient ont disparu, détruits par sa mère.

 

Même si Julia Deck traite de l’hôpital, de ses managers qui veulent gérer cela comme une entreprise, elle ne néglige pas l’humour pour respirer. Ann d’Angleterre n’est donc pas membre de la famille royale mais simplement la mère de l’autrice, issue de la classe ouvrière, dont la fille tente de retracer la vie malgré une relation compliquée entre elle deux. Heureusement, les livres et les films permettent de retisser des liens bien précieux.

 

Quant à Hélène Gaudy (photo ci-contre), elle part sur les traces de son père alors qu’elle n’a pas de souvenirs d’enfance avec lui. Alors, elle remonte le temps. Son père a vécu une enfance clandestine durant la seconde guerre mondiale avec des parents résistants.

 

 

D’urgence, elle le retrouve car il a déjà 86 ans et vit en Louisiane, sur une île qui s’appelle Jean-Charles, comme lui ! Cette île est menacée par la montée des eaux. Archipels est donc une belle histoire entre une fille et son père, un artiste dont elle découvre l’atelier et, en même temps, sa personnalité et son passé.

 

Comme ce père gardait tout, tout en respectant son intimité, Hélène Gaudy  trouve avec lui un terrain d’entente qui va plus loin que la parole. Si c’est un père rêvé, il n’est pas idéalisé.

 

Le Club des critiques de la NRF :

Maylis de Kerangal, Xabi Molia, Jérôme Ferrari et Alice Zeniter.   

 

 

S’il commence à faire un peu frais, place de l’Hôtel de Ville, la température monte soudain quand Olivia Gesbert, rédactrice en chef de la Nouvelle Revue Française, revue trimestrielle des écrivains, accueille sur scène une impressionnante palette d’autrices et d’auteurs qui, exceptionnellement, ne vont pas parler de leur dernier livre, mais vont donner leur avis et débattre à propos d’ouvrages d’auteurs étrangers.    

 

 

Le débat est animé, sérieux et teinté d’humour.

 

 

C’est Xabi Molia (photo ci-contre) qui lance le débat avec Le paradis de fous (L’Olivier) de Richard Ford, un auteur de 80 ans, qui fut lauréat du Prix Pulitzer.

 

                                                                                                                           

L'auteur de La vie ou presque parle d’un roman minimaliste, roman que Maylis de Kerangal a adoré alors que Jérôme Ferrari affirme que ce roman n’est pas pour lui.

 

 

 

 

Alors, celui qui a décroché le Prix Goncourt 2012 avec Le sermon sur la chute de Rome présente Théodoros (Noir sur Blanc) de l’écrivain roumain Mircea Cărtărescu. C’est une fiction de six cents pages, un roman historique sur un empereur, roman remarquablement traduit. Alice Zeniter et Jérôme Ferrari (photo ci-dessous) sont d’accord pour saluer une langue limpide, un livre passionnant.

 

 

Intermezzo (Gallimard) de Sally Rooney est maintenant à l’honneur grâce à Alice Zeniter qui salue ce roman irlandais. Elle parle de tendresse extrême, de roman sur le corps, sur le plaisir et le sexe.

 

Il n’y a pas débat car Maylis de Kerangal souligne la magie, l’émotion, les sentiments développés par une écriture simple qui conquiert des lecteurs par milliers.

 

 

 

 

Enfin, celle qui vient de publier Jour de ressac, réussit à nous convaincre de la qualité de L’heure bleue (Christian Bourgois éditeur), roman du suisse-allemand Peter Stamm.

 

Il conte l’histoire d’un documentaire raté à propos d’un écrivain âgé qui fait faux bond  aux réalisateurs qui l’attendaient dans son village natal. Xabi Molia n’est pas enthousiaste. Il souligne des passages pas captivants, parle d’une littérature « qui flotte ».

 

 

Photo ci-dessous : Alice Zeniter.

 

 

Nous avons envie de dire « L’émission se termine » en pensant au « Masque et la plume » lorsque Olivia Gesbert met un terme aux échanges pas faciles mais très intéressants entre ces quatre écrivains devant parler du travail d’autres écrivains.

 

Photo ci-dessous : Maylis de Kerangal

 

 

 

 

 

 

 

L’expérience était réussie et nous demandons à ce qu’elle soit renouvelée aux Correspondances de Manosque car les débats ont surtout donné envie de lire ces auteurs étrangers pas forcément mis en valeur au cours de cette rentrée littéraire 2024.

 

Ghislaine et Jean-Paul

 

 

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