Philippe Jaenada : La désinvolture est une bien belle chose

La désinvolture est une bien belle chose   par  Philippe Jaenada.

Mialet-Barrault (2024) 486 pages.

Rentrée littéraire 2024.

 

 

 

 

Dunkerque, Veules-les-Roses, Cherbourg, Dinard, Konk-Leon (Le Conquet en breton), Saint-Nazaire, Saint-Jean-de-Monts, Saint-Georges-de-Didonne, Arcachon, Hendaye, Bagnères-de-Luchon, Port-Vendres où il retrouve avec grande émotion le café de son oncle… souvenirs d’un enfant de 5 ans, La Grande-Motte, Toulon, Menton, Briançon, Évian-les-Bains, Montbéliard, Wissembourg, Sedan, Givet, Maubeuge et Dunkerque, le tour de la France de Philippe Jaenada est bouclé avant de revenir enfin à Paris !

 

 

L’auteur généreux que j’ai eu le régal de lire dans Sulak, La petite femelle, La Serpe, Au printemps des monstres puis dans Sans preuve & sans aveu, s’est lancé dans un périple impressionnant au volant d’une voiture de location, guidé par la précieuse Gladys comme il nomme la voix de son GPS : La désinvolture est une bien belle chose !

 

 

 

 

C’est à partir d’un fait divers, comme on dit, la chute mortelle d’une jeune femme de 20 ans, en 1953, du cinquième étage d’un hôtel – elle s’est jetée par la fenêtre le même jour où Pauline Dubuisson a été incarcérée ! -  qu’il brosse un tableau très complet d’une jeunesse perdue qui n’a pas pu vivre une adolescence normale durant la Seconde guerre mondiale. Cette jeune femme s’appelle Jacqueline Harispe (photo ci-dessus) mais on la nomme Kaki ou plutôt Kaky.

 

 

Photo ci-dessus aux https://correspondances-manosque.org/ 

 

Elle et ses amis fréquentent un petit bistrot, au 22 de la rue du Four, dans le Quartier Latin, et ce bar a pour nom : Chez Moineau, une boutique de parfum aujourd’hui. C’est ainsi que ces jeunes, filles et garçons, âgés de 16, 17 et 18 ans, les Moineaux, comme l’auteur les nomme affectueusement, reprennent vie, mangent, boivent, font l’amour. Patrick Modiano et Guy Debord en parlent aussi.

 

 

Fidèle à son habitude, Philippe Jaenada  partage ses questions, sa méthode et ses recherches avec son lecteur. Il s’appuie sur quantité de documents dont le plus important s’intitule « Love on the left Bank », publié en 1956 par le photographe néerlandais Ed van der Elsken (1925 – 1990) qui côtoie aussi les Moineaux.

 

 

Bien sûr, l’auteur me fait bénéficier d’anecdotes intimes mais importantes pour la compréhension de l’histoire. Il continue à fréquenter les bistrots des lieux qu’il visite, affirmant son goût immodéré pour le whisky avec toujours un sens critique aiguisé. Même s’il sait qu’il doit limiter drastiquement ses digressions, c’est trop fort. Il ne s’en prive pas mais l’humour permet de faire passer tout ça, surtout qu’il prévient rapidement de ne pas s’acharner à retenir tous les noms qu’il cite car… il y en a trop !

 

 

 

Sa véritable enquête est poussée à l’extrême. Il laisse souvent Kaki de côté pour détailler chaque famille et les origines des principaux protagonistes de l’histoire comme Boris, cet étasunien amoureux de Kaki, présent dans la chambre d’hôtel lors du drame qui ressemble à un suicide.

 

 

 

 

Tous ces mariages, ces divorces complexifient le récit et je me demande comment Philippe Jaenada fait pour ne pas s’y perdre. Au passage, il fait allusion à de nombreux gens célèbres qui ont fréquentés les quartiers, les lieux qu’il évoque.

 

 

 

 

L’auteur affirme encore plus son talent lorsqu’il décrit en détail ce qu’il voit sur une photo et, tout à coup, se met à parler de la mère de Saint-Augustin, Sainte-Monique, parce qu’il voit un livre racontant sa vie… digressions dont il est seul à avoir le secret.

 

 

Enfin, il n’oublie pas sa malheureuse héroïne lorsqu’il fait part de son scénario élaboré dans la chambre même où tout s’est passé. C’est passionnant, vibrant, plein d’émotion et lui permet de signaler que Kaky aurait atteint les quatre-vingt-dix ans si…

Jean-Paul

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