Nicolas Mathieu : Connemara

Connemara    par   Nicolas Mathieu.

Actes Sud (2022) 395 pages ; Babel (2023) 544 pages.

Difficile de sortir indemne de ce roman qui se révèle être une fresque très réaliste de la France régionale.

De nombreux allers-retours entre le passé et le présent avec deux personnages Hélène et Christophe permettent de se rendre compte du temps qui passe et qui ne se rattrape plus.

Hélène tout comme Christophe, adolescents dans les années 1990, sont nés dans une petite ville de l’Est de la France.

Hélène, après avoir fait de brillantes études, essayé Paris, vit maintenant à Nancy depuis peu avec son mari et ses deux filles et est cadre dans une entreprise de conseil. Elle a réalisé le rêve de son adolescence, mais un sentiment de gâchis est là…

« Pourtant, sur le papier, elle avait tout, la maison d’architecte, le job à responsabilités, une famille comme dans Elle, un mari plutôt pas mal, un dressing et même la santé. Restait ce truc informulable qui la minait, qui tenait à la fois de la satiété et du manque. Cette lézarde qu’elle trimballait sans savoir. »

Christophe, lui, n’est jamais parti, préférant les copains et la teuf, remettant au lendemain les grandes décisions. Il vit avec son père et son fils, est commercial dans une entreprise d’aliments  pour chiens. Gloire locale en son temps, il rêve de rejouer au hockey comme à seize ans. On pourrait croire qu’il tout raté, mais lui pense que tout est encore possible.

Si les deux quadragénaires se sont pourtant croisés dans leur jeunesse, s’ils viennent du même milieu, tout semble aujourd’hui les séparer car ils n’appartiennent plus au même monde, mais une rencontre impromptue va être l’origine d’une sorte d’escapade.

C’est donc ce tremblement survenu au mitan de leur vie que Nicolas Mathieu raconte et analyse, cette envie de tout refaire qui gronde plus ou moins en chacun de nous, tout en soulevant cette question de savoir si réussir sa vie consiste à grimper socialement en s’arrachant à son milieu d’origine.

Ce roman noir et social brille par maintes facettes. Il est une magnifique étude de l’adolescence, il est un regard décapant d’une France dont on entend rarement parler. Nicolas Mathieu, Prix Goncourt 2018 avec Leurs enfants après eux, raconte avec talent la fusion des régions, en l’occurrence, celle qu’il connaît bien qui a formé ce territoire du Grand Est. C’est avec un humour féroce qu’il explique comment la réforme des régions de 2015 a fait la fortune des cabinets de consulting, leur but étant de réduire la masse salariale, se faisant payer grassement pour le faire. Il décrit sans pitié leur efficacité, nous immergeant dans cette nouvelle langue managériale qui a parfois décoiffé l’Ardéchoise que je suis, sans oublier d’ironiser sur les fameux open space où le sexisme est toujours présent …

Ce qui fait le charme de ce roman, c’est la profonde imbrication de l’intime dans le social.

Ce roman est une mélancolique et quelque peu désabusée célébration de la vie, sans nostalgie pourtant, dans lequel j’ai ressenti beaucoup de désenchantement.

Connemara, cette chanson de Michel Sardou, dont Nicolas Mathieu a pris le titre pour son roman, est tout un symbole. Commune à tous, connue et fredonnée par tous, elle est cependant comme une ligne de démarcation, car l’entendre dans les fêtes de H.E.C. ou lors d’un mariage populaire, ce n’est pas la même chose...

Connemara de Nicolas Mathieu, cette fresque sociale et politique remarquable avec ces retrouvailles entre deux êtres nés au même endroit mais aux trajectoires opposées, qui se déroule en 2017, lors de l’élection présidentielle, m’a happée dès les premières pages et enthousiasmée de par sa lucidité et son réalisme.

À signaler que ce roman a été en compétition pour le 48^e  Prix du Livre Inter en 2022 et qu’il a été adapté au cinéma par Alex Lutz.

Ghislaine

Comments

[Martine]

Beaucoup de longueurs et de clichés, pas son meilleur livre, à mon avis

[Martine]

Assez déçue, mais la lecture quoiqu'intéressante ne m a pas entrainée
Trop de longueurs, des clichés, des poncifs sur tout & tous.

Les personnages sont bien décrits mais là encore je n'ai pas accroché. Hélène est particulièrement caricaturale & son entreprise & acolytes de travail aussi

[Alex-Mot-à-Mots]

Quelques longueurs tout de même dans ce roman.

[Ghislaine DEGACHE]

Pas trop trouvé...