Philippe Hayat : La Loi du désordre

La Loi du désordre   par   Philippe Hayat.

 Calmann-Lévy (2022) 364 pages ; Le Livre de Poche (2024) 384 pages.

 

 

 

Après Où bat le cœur du monde, que j’avais fort apprécié, je viens de découvrir La loi du désordre, troisième roman de Philippe Hayat, véritable plaidoyer contre la guerre et superbe roman d’amour.

 

 

 

Grand coup de cœur pour ce livre qui mêle de manière très addictive la petite histoire à la grande. Situé sur une courte période, du 12 juillet 1914 au 15 septembre de cette même année, il se présente comme un journal et montre comment en quelques jours l’Histoire a basculé.

 

 

 

En juillet 1914, à Paris, Jeanne, une étudiante brillante, termine son mémoire à l’École normale supérieure de la rue d’Ulm.

 

Pour cela, elle a dû rompre avec ses parents. Pour eux, une femme ne pouvait se réaliser qu’en fondant un foyer.

 

 

Pigiste chez Jaurès à L’Humanité pour payer son loyer, militante socialiste, elle deviendra journaliste et partagera avec Jaurès ses combats pour la paix.

 

Son frère Charles qui, lui, rêvait de poursuivre ses études est resté à Senonches, sommé par son père autodidacte, devenu industriel, producteur de châssis automobiles, de le seconder dans son usine afin de lui succéder ultérieurement.

 

 

Fréquentant les milieux artistiques, partageant des moments conviviaux et pittoresques autour d’une bonne table au carrefour Vavin dans le quartier Montparnasse avec Chaïm Soutine, Utrillo ou Modigliani, Jeanne et son ami Jules vont bientôt voir s’effondrer tous leurs espoirs d’une vie heureuse dans la paix.

 

 

 

Depuis l’attentat de Sarajevo (document ci-dessus), c’est en effet une escalade vers la guerre mais Jeanne ne peut y croire. Comment l’homme pourrait-il précipiter sa destruction ? Jaurès tente d’infléchir la politique gouvernementale dans un sens favorable à la paix, rappelant le mot d’ordre de grève générale décidé par l’Internationale ouvrière en cas de déclenchement de la guerre mais le conflit menace et les graves révélations au Sénat sur la situation de l’armée, sont inquiétantes, cette armée qui, le 14 juillet, ne joue à la guerre que pour la parade.

 

 

Avec l’assassinat de Jaurès le 31 juillet 1914 (document ci-dessus), la mobilisation générale le 1er août, c’est une partie de la vie de Jeanne, sa vie jusque-là, qui se termine…

 

 

Elle doit faire des choix. Apprenant que Charles a été enrôlé, et devenue inutile à Paris, elle décide de s’engager sur le front pour le retrouver.

 

 

La loi du désordre permet de comprendre avec clarté le combat qu’a mené le député socialiste Jean Jaurès pour éviter la guerre et comment son meurtre a mis un terme aux efforts désespérés qu’il avait entrepris depuis l’attentat de Sarajevo pour éviter la déflagration militaire en Europe.

 

 

 

Extrêmement riche et documenté ce roman historique a le souffle d’un grand roman populaire. Philippe Hayat maîtrise de façon vivante, palpitante et très réaliste cette immersion dans le combat politique passionné de l’avant-guerre  avec cette  confrontation d’une jeune idéaliste à l’absurdité du monde. De manière tout aussi réaliste, il nous plonge dans les premières semaines de la guerre, l’enfer des combats et le rôle tellement important qu’ont joué ces « anges blancs », risquant à chaque seconde d’y laisser aussi leur vie. Lors de l‘engagement de Jeanne pour rejoindre le front en tant qu’infirmière, la rencontre avec Alfred Dreyfus (document ci-dessous) pour le choix du régiment auquel elle sera affectée est vraiment intéressante et judicieuse.

 

Roman tout aussi passionnant qu’instructif, il démontre et il en est malheureusement encore besoin, toute l’absurdité de la guerre.

 

C’est aussi un amour fraternel de toute beauté qui nous est conté avec cette extraordinaire sensibilité partagée entre Jeanne et son frère et également un combat féministe de haute volée pour notre héroïne.

 

La loi du désordre de Philippe Hayat est un roman puissant, et fascinant, très attachant que je recommande chaleureusement.

 

 

À noter la superbe couverture, une toile « Le Village » de Chaïm Soutine !

 

 

Ghislaine

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