Sarah Barukh : De bleu, de blanc, de rouge et d'étoiles

De bleu, de blanc, de rouge et d’étoiles   par  Sarah Barukh.

 Harper Collins (2025) 263 pages.

 

 

Avec De bleu, de blanc, de rouge et d’étoilesSarah Barukh nous entraîne aux quatre coins du monde à la rencontre de personnages, hommes et femmes très différents, qui se trouvent pourtant frappés par les mêmes guerres fratricides, sur fond d’obscurantisme et de déni d’humanité.

 

 

Cette écriture est devenue indispensable à son équilibre après le 7 octobre 2023. Raconter sa déchirure à travers des personnages qu’elle connaissait et qu’elle avait eu peur d’animer jusque-là, écrire étant devenu son seul moyen de défense.

 

 

 Ce roman choral magistral raconte des vies déchirées.

 

 

Jeanne, jeune femme juive française, psychiatre dans un hôpital du Val-de-Marne, sent monter en elle une peur irrépressible lorsque survient la tuerie de Charlie le 7 janvier 2015. Elle appelle aussitôt son père lui faisant promettre de ne pas bouger. C’est tout le passé qui refait surface pour tous deux.

 

 

Elle cherche aussi à joindre Mo, son ami, d’origine algérienne, qu’ils ont hébergé un temps quand son frère Farès, à son retour d’Afghanistan, avait réussi à imposer la charia dans leur maison. Il est alors « Le petit frère de « l’émir » protégé par des juifs ». Pour fuir sa famille toxique, il est parti travailler en Thaïlande, sachant que tôt ou tard, la folie de son frère ferait des morts.

 

 

Au sein de ce récit, s’entremêlent également d’autres vies aux destins brisés par la violence des hommes. C’est le cas de Rima, la belle et jeune pakistanaise, ouvrière textile, donnée en mariage, à quatorze ans à l’une des têtes pensantes du Jamaat-ul-Ahrar, groupe djihadiste pakistanais, assassin d’une centaine d’enfants, âgé de trente-sept ans. C’est aussi celui de Isaias, migrant érythréen qui se rêvait grand mathématicien et qui a fui lui, son pays en crise tout comme Jin, fils de paysans du Wuyuan, en Chine, l’a fait pour ne pas disparaître.

 

 

Et quelle surprise de voir ce dernier apprécier dans un premier temps la mélodie de Emmenez-moi, cette chanson de Charles Aznavour avant d’en trouver la traduction, se demandant éberlué, comment cet homme né en France de parents réfugiés a pu décrire avec tant de justesse sa vie à lui et ce désir de fuir la misère.

 

 

Ce sont aussi Thomas Ngam, ce patient ivoirien, qui se confie au Dr Jeanne Rougemont et parle de l’influence de Soral et des agissements de « Égalité et réconciliation », Nawal, cette fillette de huit ans, de Qalqiya en Cisjordanie, Clémence qui nous fait découvrir le monde des ONG, ou encore Refaël, aide-soignant israélien. Tous, inspirés de personnes que l’autrice connaît ou a rencontrées, donnent vie à ce formidable roman où l’on comprend à la fin qu’ils sont tous liés les uns aux autres.

 

 

 

On découvre ainsi des frères et des sœurs d’humanité qui doivent faire face à des dilemmes, des choix qui n’en sont pas, s’ils veulent rester en vie d’autant qu’ils ont dû, la plupart du temps se séparer de leur famille.

 

 

Identité, migration, terrorisme, ces sujets d’une actualité plus que brûlante, plutôt que de les traiter en termes d’idéologies, Sarah Barukh a préféré les aborder à hauteur d’humains et dans leur globalité, en ne se focalisant pas sur un seul pays.

 

 

Ces petits drapeaux fabriqués par Rima, l’un taché de son sang, transportés par Jin, vendus par Isaias sont portés fièrement par Nina, la fille de Jeanne et par des milliers d’autres manifestants lors de cette journée unique, le 11 janvier 2015, quelques jours après le choc des attentats de Charlie hebdo et de l’Hyper Cacher de la porte de Vincennes, sans savoir dans quelles conditions ces petits objets ont été fabriqués.

 

 

Celui brandi par la petite Nina deviendra un émouvant symbole d’espoir lorsque, déposé dans un pot de fleurs sur son balcon en plein Paris, une hirondelle viendra y faire son nid, et y pondra deux œufs ! Sarah Barukh conclura d’ailleurs avec ces étoiles de l’espoir qui peuvent parfois briller autour de nous.

 

 

Véritable plaidoyer contre l’antisémitisme et la montée de l’islamisme radical, mettant en garde contre les menaces de plus en plus graves qui pèsent sur notre société, De bleu, de blanc, de rouge et d’étoiles est un livre éprouvant empli de ténèbres, de douleurs, de violence mais qui montre également une humanité qui résiste.

 

 

Sans jamais tomber dans le sentimentalisme, Sarah Barukh sait pourtant avec une sensibilité extrême nous faire vibrer et nous émouvoir profondément. C’est le cas par exemple avec cette lettre de Rima absolument pétrifiante mais pleine d’amour adressée à son enfant qui ne naîtra pas. Ça l’est aussi avec cette gosse de huit ans, Nawal, vivant en Cisjordanie, qui ne rêve qu’à son costume de princesse promis par son frère avant qu’il ne parte pour une mission importante et que Jeanne va tout faire pour retrouver plus d’une dizaine d’années après, pour tenter, elle la Juive une marche impossible avec cette jeune femme palestinienne, une marche peut-être pas si impossible…

 

 

Une question me taraude, pourquoi les religions qui, au départ prônent, chacune à leur manière, l’amour de son prochain, ont-elles toujours opposé leurs partisans entre eux et continuent dans cette voie, portées par des fanatiques ?

 

 

Le message est pourtant clair, il suffirait que chacun soit sensible à l’humanité de l’autre pour que cesse ce déferlement de violence qui s’intensifie chaque jour, un doux vœu de paix …

 

 

Merci aux éditions Harper Collins et à Babelio pour m’avoir fait découvrir ce roman puissant, réaliste, et tellement poignant et merci à Sarah Barukh (photo ci-dessus) pour le courage dont elle a du faire preuve pour coucher ses peurs sur le papier et merci à elle pour son message d’espoir.

 

 

Il reste à attendre l’autre partie à ce livre, la partie écrite à la première personne...

 

Ghislaine

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
D
Tres envie de le lire, je suis admirative de tout ce que fait Sarah Barukh poir les femmes, et contre les violences
Répondre
G
Effectivement, quelle femme !
Thème Magazine -  Hébergé par Overblog