Jérôme Chantreau : L'affaire de la rue Transnonain

L’affaire de la rue Transnonain   par  Jérôme Chantreau.

 La Tribu (2025) 463 pages.

 

 

 

Deux cents ans après les faits, Jérôme Chantreau rouvre le dossier criminel concernant le massacre qui eut lieu au 12 de la rue Transnonain, massacre de civils effectué par des troupes de Louis-Philippe lors d’un mouvement populaire le 14 avril 1834 à Paris.

 

 

Époustouflant et passionnant, L’affaire de la rue Transnonain, près de 460 pages pourtant, se dévore.

 

 

Roman historique mais également polar. En effet, l’auteur, tout au long du bouquin, va mener l’enquête sur le destin tragique des habitants de cet immeuble situé au 12 de la rue Transnonain et chercher à comprendre pourquoi, en pleine émeute parisienne, les hommes de troupe s’en sont pris à ce logis où l’activité artisanale, le commerce et l’habitat cohabitaient et où le médecin légiste venu sur les lieux, s’attendait à examiner des dépouilles d’insurgés et non pas une maisonnée de commerçants.

 

 

Depuis le 9 août 1830, succédant à la Restauration, c’est la monarchie de juillet de Louis-Philippe, le régime politique de la France.

 

 

En ce mois d’avril 1834, de nombreuses insurrections ont lieu dans le pays.

 

 

Adolphe Thiers (photo ci-dessus), alors ministre de l’intérieur, balaye violemment les troubles qui éclatent d’abord à Lyon, avec la seconde révolte des canuts, ensuite dans les villes voisines, puis à Paris où une semaine d’affrontement a lieu entre la troupe et les insurgés. Le responsable de cet embrasement ? La Société des droits de l’homme, qui attise le ressentiment et la colère du peuple. Il faut donc détruire la SDH

 

Lithographie d'Honoré Daumier : Rue Transnonain.

 

Le ministre-mouche, dénommé ainsi en raison de sa petite taille, donne l’ordre au général Bugeaud de réprimer durement le mouvement.

 

 

Selon la thèse officielle, un capitaine d’infanterie aurait été blessé par un coup de feu tiré depuis une fenêtre près d’une barricade de la rue Transnonain, le massacre aurait donc été perpétré en représailles, le retentissement de l’affaire sera amplifié par la lithographie de Daumier (photo ci-contre).

 

 

Jérôme Chantreau va investiguer sur ce crime d’État par l’intermédiaire de l’agent Joseph Lutz, ancien subalterne de Vidocq. Ce policier est lancé sur la trace d’une jeune prostituée flamboyante Annette Vacher, dite Perle la rouge par le préfet de police, une paire de bas ayant été trouvée dans la chambre du cinquième étage où a été tué Louis Breffort.

 

 

Les chemins que suivent Lutz et Annette, l’un pour sauver l’autre et l’autre pour fuir le premier sont semés d’embûches et de rebondissements.

 

 

Avec beaucoup de suspense, Jérôme Chantreau (photo ci-dessous) fait revivre avec un immense talent cette période mouvementée de l’histoire, n’hésitant pas à faire des va et vient dans le temps, sans pour autant perdre le lecteur, mêlant personnages réels et faits authentiques à quelques digressions fictionnelles n’entachant en rien le récit historique.

 

 

Dans de courts chapitres, il nous plonge avec un grand réalisme dans ces ruelles étroites et insalubres du Paris préhaussmannien, nous fait ressentir la misère et remet en mémoire cette journaliste et écrivaine féministe Suzanne Voilquin (portrait ci-dessous) et le mouvement saint simonien.

 

 

 

J’ai trouvé instructif également, et original, d’insérer au cours du récit quelques extraits d’articles parus dans les journaux d’opposition tels que Le Charivari ou La Caricature, ou dans La Quotidienne, journal royaliste ou encore dans La Tribune des départements, organe quasi officiel de de la SDH.

 

 

Très bien documenté, L’affaire de la rue Transnonain est un ouvrage richissime remarquable.

 

Il m’a permis tout simplement de découvrir un fait historique que j’ignorais et de prendre connaissance de ce qu’un pouvoir acculé et vacillant avait été capable d’accomplir pour se maintenir en place : édifiant !

 

 

 

Après Aveu de tendresse, L’affaire de la rue Transnonain est le deuxième roman de la nouvelle maison d’édition La Tribu que je découvre et je dois dire que j’ai été conquise par ces deux ouvrages.

 

 

Je trouve particulièrement réussie leur couverture avec cet effet de première page en partie arrachée où l’on découvre une partie de texte, la phrase mise en exergue étant judicieusement choisie. Dans ce dernier « On ne tue pas le peuple dans son lit ».

 

 

Un immense merci à La Tribu et à Babelio.

Ghislaine

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