MARIEMO : Pied à terre, une expédition à bord de l'Ocean Viking
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Pied à terre :
une expédition à bord de l’Ocean Viking.
par Mariemo.
Antipodes (2024).
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En 2021, après Les mains glacées, son premier livre sur son expédition au Groenland dans lequel Mariemo rend compte des dégâts causés par le réchauffement climatique, la graphiste et illustratrice neuchâteloise a envie de se lancer dans un nouveau projet de reportage. Le sujet des migrations l’intéressant depuis quelque temps déjà, lui vient alors l’idée d’embarquer sur un bateau de sauvetage.
Par chance, ses éditeurs connaissent quelques membres de l’association SOS Méditerranée et une place à bord de l’Ocean Viking est envisageable, il faut seulement patienter jusqu’à ce qu’une place média se présente…
En attendant, notre bédéaste se renseigne sur l’actualité des naufrages en Méditerranée, revenant sur la naissance de l’Association citoyenne SOS Méditerranée, cette organisation humanitaire européenne dédiée à la recherche et au sauvetage des migrants en détresse, et, le 27 janvier 2022, alors qu’elle se trouve en plein Festival d’Angoulême, elle apprend qu’un départ est finalement possible. Le 2 février, elle embarque à bord du navire humanitaire, à Syracuse où l’Ocean Viking s’arrête régulièrement pour se ravitailler en carburant provisions et équipements. C’est au cours de ces haltes que les équipes à bord changent et une rotation commence alors pendant cette escale, pour une durée d’environ vingt-cinq jours.
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S’en suit pour Mariemo (photo ci-dessus) une foule d’informations à enregistrer, un petit lexique du vocabulaire des marins-sauveteurs à assimiler et une visite du navire de sauvetage s’impose « un labyrinthe dans lequel tout le monde se balade en crocs ». Deux magnifiques double-pages sont là pour nous présenter le navire à quai et l’intérieur de « l’immeuble flottant ».
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Au fil des pages, l’artiste explique en quelques mots les termes utilisés lors de ces missions, par exemple le RHIB, ce canot de sauvetage spécial, le MCP, Massa Casualty Plan, l’organisation de la prise en charge de plusieurs cas critiques en même temps, le Women’s schelter, l’abri spécifique pour les femmes, et d’autres encore... Les quelques explications sont ensuite traduites par des pages superbes pour les mettre en scène avec des dessins très minutieux, très doux et d’une expressivité remarquable, d’où la poésie n’est pas exclue ! Tout est en noir et blanc, à l’encre de Chine : un rendu somptueux !
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Il faut savoir que, depuis 2019, l’Ocean Viking navigue sur la route migratoire maritime la plus meurtrière au monde, entre la Libye et l’Italie, portant secours à tous ceux qui tentent la traversée.
Au cours de cette mission, une embarcation à la dérive leur est signalée. Deux canots de sauvetage sont mis à l’eau et repèrent un Rubber Boat au loin qui vacille, l’embarcation n’étant pas en état et surtout pas adaptée pour la haute mer.
À bord, pas moins de quatre-vingt-deux migrants dont cinquante-huit mineurs. L’opération de sauvetage débute avec l’évacuation en plusieurs aller-retour jusqu’au bateau mère, les plus faibles en premier.
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Pied à terre, reportage journalistique dessiné se révèle un formidable témoignage sur cette association SOS Méditerranée qui a affrété l’Ocean Viking et qui a vocation à porter assistance à toute personne en détresse en mer.
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Les premières pages de la bande dessinée nous rappellent d’ailleurs et de façon fort émouvante que chaque jour, des femmes, des hommes et des enfants qui partent en quête d’un ailleurs, d’une seconde chance, pour des raisons économiques, politiques ou culturelles, qui ont laissé derrière eux familles et maisons, se noient aux portes de l’Europe.
Comme tient à le préciser Marie-Morgane Adatte, Mariemo, son nom d’artiste, ce livre n’étant pas un travail de commande, les idées exprimées ne reflètent que son opinion.
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Une opinion que je partage entièrement « On ne peut pas ignorer des vies humaines » et comme elle, sans l’avoir vécu mais seulement en parcourant ce superbe récit, mon rapport à la mer s’est transformé et mon sentiment d’injustice et de révolte s’est encore aggravé…
Je ne saurais trop remercier Babelio et les éditions Antipodes dont la ligne éditoriale privilégie la critique sociale, les textes solides graphiquement et la création graphique indépendante pour cette superbe découverte.
Ghislaine