MENU

Jean-Noël Orengo : "Vous êtes l'amour malheureux du Führer"

« Vous êtes l’amour malheureux du Führer »   par Jean-Noël Orengo.

Grasset (2024) 263 pages.

 

 

 

 

Albert Speer fut l’architecte d’Adolf Hitler puis ministre de l’armement et de la production de guerre. Il occupe cependant une place distincte au sein de l’histoire nazie.

 

 

Le titre du roman de Jean-Noël Orengo « Vous êtes l’amour malheureux du Führer » une citation d’un officier SS, un juriste chargé notamment de l’expulsion des Juifs de Berlin pour la construction des monuments futurs, un des collaborateurs d’Albert Speer  traduit bien la relation particulière qui existait entre Adolf Hitler et Albert Speer, celle de deux hommes fascinés l’un par l’autre.

 

 

 

Mais outre le fait d’être le favori du Führer, du guide,  comme il le nomme, c’est au cours du procès de Nuremberg qu’Albert Speer va se détacher des autres prévenus. Cet homme grand, svelte, la quarantaine distinguée, se montre attentif, respectueux durant toute la procédure, se révélant le contrepoint parfait de Göring et des autres.

 

 

Affirmant n’avoir jamais rien su de la Solution finale, il plaide non coupable à titre individuel, coupable à titre collectif. Il a su impressionner le jury  et est condamné à vingt ans de détention, étant l’un des rares proches d’Adolf Hitler à échapper à la peine de mort. Il purgera sa peine à la prison berlinoise de Spandau où il rédigera ses souvenirs qu’il publiera après sa libération en 1966.

 

 

« Au cœur du Troisième Reich », ses Mémoires allant de sa naissance au procès de Nuremberg remporteront un succès considérable.  Elles seront considérées comme l’une des descriptions internes les plus détaillées du fonctionnement de l’appareil politique nazi et restent encore une source historique de première main. Viendront ensuite les « Carnets secrets », son journal tenu à Spandau.

 

 

Les Mémoires de Speer (photo ci-dessus) ont été remises en question par certains historiens et notamment par l’historienne et journaliste au Sunday TimesGitta Sereny (photo ci-dessous).

 

 

Dans son roman, Jean-Noël Orengo s’est intéressé à la relation d’étude de cas de ce personnage historique, Speer, qu’a menée l’historienne pour tenter de percer ses secrets, relation devenue amicale. Véritable star, l’homme est composé de plusieurs strates ou plus exactement de plusieurs versions de lui-même et G. Sereny doit rester très vigilante pour les distinguer et essayer de retenir la plus probable.

 

Pas du tout séducteur, et pourtant l’homme exerce une attraction incontestable par sa prestance.

 

Au contact d’Hitler, il  a appris à haïr la défaite et il est prêt à tout pour sauver sa tête et il y parvient  en donnant une fiction extrêmement forte de lui, réussissant à transformer sa défaite en victoire !

 

Ses Mémoires sont une vraie autofiction « politique et esthétique ».

 

Avec ce roman, je dois avouer que j’ai beaucoup appris sur ce personnage. J’ignorais déjà qu’il était le favori du Führer, que l’homme de pouvoir était fasciné par l’homme d’art et inversement, que ce ministre d’Hitler s’était transformé en star et possédait une aura incroyable auprès des foules et des spécialistes qu’aucun survivant de la Shoah ne possède.

 

 

 

Ce roman offre une réflexion moderne et très intéressante sur la vérité et la fiction, sur le pouvoir tellement puissant de la fiction et Jean-Noël Orengo (photo ci-contre) livre une analyse très fine de ce personnage qu’était Speer, sur sa relation ambigüe avec Hitler, de même qu’une réflexion passionnante sur la manière d’écrire l’Histoire.

 

Ghislaine

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Thème Magazine -  Hébergé par Overblog