Michel Guénaire : La Visite
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La Visite par Michel Guénaire.
Grasset (2025) 139 pages.
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C’est à quelques kilomètres de son quartier général, dressé près de Brûly-de-Pesche, dans les Ardennes belges, la Wolfsschlucht, la Gorge du loup, un nom associé à son animal préféré le loup, d’où il a surveillé la Blitzkrieg, remportée contre la France, qu’Hitler s’envole en ce dimanche 23 juin 1940 pour la Blitzbesuch, une invraisemblable visite de Paris. Après la Guerre éclair et au lendemain de l’armistice qui consacre la défaite et la soumission de la France, ce sera la Visite éclair, qui ne durera que deux heures trente minutes !
À bord de son Condor personnel, dont le pilote officiel Baur est comme son double, le Führer est entouré d’une courte escorte soigneusement choisie.
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Parmi eux, l’architecte Albert Speer nommé le 30 janvier 1937, inspecteur général de la Construction et Arno Breker, le sculpteur favori, seront à ses côtés tout au long de la visite. C’est avec eux qu’Hitler veut faire le Berlin de demain : Germania et pour cela s’inspirer de Paris, cette ville qu’il considère comme une merveille de la culture occidentale.
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Après l’atterrissage sur la piste du Bourget, Hitler prend place dans sa grosse Mercedes-Benz 770 K noire, quatre autres Mercedes-Benz avalent le reste de la troupe.
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Deux autres hommes entrent en scène, même s’ils ne montent pas dans la voiture de tête avec Speer et Breker (photo ci-dessous). Il s’agit de son photographe privé Heinrich Hoffmann et du jeune reporter-photographe Walter Frentz qui vont se compléter au cours de la visite, le premier avec son appareil photo et le second avec sa caméra. Tous deux immortaliseront cette visite à la gloire du Führer, avec notamment ces photos sur l’esplanade du Trocadéro d’Adolf Hitler, Breker à sa gauche et Speer à sa droite, avec la tour Eiffel en arrière-plan.
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Dans ce petit ouvrage de 130 pages, Michel Guénaire relate avec talent, étape par étape, cette visite qui débuta par l’opéra Garnier, puis la Madeleine, l’Arc de triomphe, le Trocadéro, les Invalides, le Panthéon, et pour finir le Sacré-Coeur.
Sa visite a plusieurs prolongements que l’auteur détaille très bien.
Si Hitler est venu à Paris, c’est avant tout pour s’inspirer de son urbanisme, son dessein étant de détrôner la capitale française au profit de son projet mégalomaniaque de Germania. On prend ici conscience de la vocation d’architecte ratée d’Hitler.
Outre cette réflexion intéressante et instructive sur le sens de cette visite, Michel Guénaire consacre plusieurs chapitres au devenir des différents protagonistes, à commencer par cette aventure suicidaire dans laquelle Hitler se précipite un an presque jour pour jour après la visite, avec la conquête de la Russie soviétique alors qu’il est à son apogée.
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Ce récit dans lequel Michel Guénaire (photo ci-dessous), en recoupant témoignages et mémoires, reconstitue cette escapade de deux heures trente au cours de laquelle Hitler arpente les rues de la capitale, au lendemain de l’effondrement de la France, est passionnant et se lit d’un trait.
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C’est absolument surréaliste de déambuler dans ce Paris désert, aux côtés de ce dictateur entouré de ses proches, tous en tenue militaire, avec le même pardessus qui leur descend jusqu’aux chevilles, qui connaît parfaitement les lieux et leur architecture, et prend ainsi quasiment possession de Paris.
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Cet ouvrage m’a permis de faire plus ample connaissance avec ce fait historique peu relaté et il est venu compléter un roman que j’ai découvert récemment Vous êtes l’amour malheureux du Führer de Jean-Noël Orengo qui présente une analyse fine du personnage de Speer, et ainsi de confirmer la psychologie de celui-ci.
Ghislaine
