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Andreï Kourkov : Les bains de Kiev

Les bains de Kiev   par  Andreï Kourkov. 

Titre original : Samson i bannoye delo.

Traduit du russe (Ukraine) par Paul Lequesne.

Liana Levi (2025) 381 pages.

 

 

 

 

Après L’oreille de Kiev et Le cœur de Kiev, Andreï Kourkov poursuit son grand feuilleton historique avec Les bains de Kiev et c’est avec grand plaisir que j’ai retrouvé la suite de ce superbe feuilleton.

 

 

Nous sommes toujours à Kiev et, en ce printemps 1919, vingt-huit soldats de l’Armée rouge ont mystérieusement disparu aux bains municipaux, en plein cœur de la ville. Seuls leurs vêtements ont été retrouvés au vestiaire. Ont-ils déserté ? Ont-ils été enlevés ? Ont-ils été assassinés et si oui, par qui ? Des brigands, des agents de la contre-révolution ?

 

 

 

Samson, jeune enquêteur au service de la milice, va arpenter les rues de la ville, se rendre aux bains, en visiter la chaufferie, interroger entre autres l’homme du vestiaire, le responsable de la chaufferie, pour essayer de retrouver où sont passés ces disparus et élucider le mystère. Difficile en cette période car Kiev est le théâtre de multiples meurtres et de nombreux complots.

 

 

Néanmoins, le jeune Samson, très persévérant, s’acharne à retrouver ces vingt-huit hommes, tentant de démêler un écheveau d’indices contradictoires. Pour cela, il opère de façon méthodique, n’oubliant pas lors d’interrogatoires, d’utiliser les quelques consignes qui lui avaient été révélées lors d’un bref stage de formation, sans négliger non plus, l’aide de son oreille droite, tranchée certes, mais qui, déposée dans une petite boite à bonbons, n’a rien perdu de son étonnant pouvoir puisque, où qu’elle soit, elle entend tout et transmet ce qu’elle entend à l’oreille interne de Samson !

 

 

Son coéquipier Kholodny, un prêtre défroqué, lui prêtera également main forte dans son travail d’enquête, notamment lors d’un interrogatoire, ou plutôt d’une confession, tout comme l’aidera la complicité involontaire, très étonnante mais décisive d’un cheval.

 

 

Son obstination sera déterminante mais il lui faudra beaucoup de patience car au fil de son enquête, il va tomber sur d’autres affaires, notamment une affaire de contrebande de caviar, et il ne sera pas simple de démêler le tout.

 

 

On retrouve dans ce troisième opus toute la verve de Kourkov et son talent pour brosser une peinture étonnante de réalité d’une ville sous pression et du quotidien précaire de ses habitants avec leurs difficultés pour se nourrir, se chauffer, se loger, se vêtir et la débrouille pour survivre aux bouleversements subis : une vraie fresque sociale dans une période de guerre.

 

 

J’ai trouvé extraordinaire la faculté de l’auteur à nous ramener de façon aussi réaliste, cent ans en arrière en plein cœur de Kiev, aux côtés de son héros et à nous faire vivre ses aventures et à nous en faire éprouver son ressenti. J’aurais apprécié la présence d’un plan pour, malgré les risques encourus, pouvoir mieux l’accompagner dans ces rues et ruelles au risque de me faire renverser par une carriole ou une briska filant à vive allure, ou sur la grande place du Marché juif ou encore entrer dans cette brasserie exiguë et mal éclairée où l’on ne sert pas de Kabinetnoïé, seulement de la Bavaroise et de la Stolovoïé. Les bruits, les odeurs, les couleurs, sombres, tout est là pour une réelle immersion dans la cité ukrainienne en ces journées d’avril 1919.

 

 

L’auteur nous promène dans cette capitale d’une Ukraine sous domination soviétique, en proie aux turbulences politiques et nous fait toucher du doigt les tensions existant entre la milice et la Tchéka.

 

 

Tout comme L’oreille de Kiev et Le cœur de Kiev, Les bains de Kiev, dernier roman de Andreï Kourkov, m’a une fois encore permis d’en apprendre davantage sur cette période historique méconnue, tout en retrouvant certaines quasi similitudes avec l’époque actuelle.

 

 

Les bains de Kiev est un polar historique, politique et sociologique mené avec une extrême habileté où, la plupart du temps, le contexte politique est adroitement suggéré plutôt que dépeint frontalement et avec beaucoup de rythme par ce maître de l’absurde qu’est Andreï Kourkov (photo ci-dessous).

 

 

Les dernières pages viennent confirmer la perfidie mais aussi la complexité du tchekiste Abiazov et la dernière phrase, quant à elle, tout en suscitant l’angoisse au sujet de Naïden, supérieur de Samson, est fort réjouissante, puisqu’elle est promesse d’un opus ultérieur !

 

 

À noter la superbe traduction de Paul Lequesne.

 

Un grand merci aux éditions Liana Levi et à Babelio pour m’avoir permis de continuer à avoir des nouvelles de ce cher Samson Koletchko.

 

Ghislaine

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