Éric Vuillard : La guerre des pauvres

La guerre des pauvres     par    Éric Vuillard.

Actes Sud, un endroit où aller (2019), 68 pages..

 

Comment écrire un livre très actuel en parlant de faits datant de plusieurs siècles ? Éric Vuillard (photo ci-contre) le fait et le réussit bien dans ce court récit, La guerre des pauvres. Auteur découvert avec 14 juillet puis son fameux Prix Goncourt, L’ordre du jour, il excelle dans la concision et sa lecture est toujours très instructive.

 

 

En quelques pages, il nous raconte l’histoire de Thomas Müntzer dont le père fut exécuté en 1500. La vie de cet homme aurait sûrement été tout autre si, cinquante ans plus tôt, l’invention de l’imprimerie n’avait permis à de plus en plus de monde de lire enfin la Bible dans le texte plutôt que de se contenter de ce latin incompréhensibles et des commentaires orientés des gens dit d’Église.

 

 

Éric Vuillard rappelle fort à propos que, deux siècles plus tôt, de l’autre côté de la Manche, Johan Wyclif avait traduit cette même Bible en anglais, préconisant une relation directe à Dieu, se passant donc de prélats. Ensuite, John Ball a mené la révolte contre une nouvelle taxe : « Les paysans marchent en ordre et ils sont nombreux, plus de cent mille, on vient de partout, des foules misérables se rassemblent. » Hélas, ces révoltes se terminent dans le sang et par l’écrasement des plus faibles.

 

 

Retour en Bohême avec Jan Hus qui se bat contre l’argent et le pouvoir des princes : jugé, brûlé ! Enfin, on retrouve Thomas Müntzer en 1522. Il dit la messe en allemand, parle de « pauvres laïcs et paysans » mais ne voit que la violence pour changer, violence qui se retourne contre les hordes de misérables.

 

 

Dans ce livre étonnant, Dieu est mis à toutes les sauces, permettant de justifier tout et son contraire. Cette invention humaine offre toutes les perspectives puisqu’on lui fait dire ce que l’on veut, s’appuyant sur des textes écrits puis réécrits par des humains.

 

 

Éric Vuillard rappelle donc et démontre que seule la violence arrive à faire reculer les puissants qui ne cessent de tout faire pour s’enrichir toujours plus. Hélas, ceux-ci possèdent la force et les armes. Combien de révoltes suscitées par la misère se sont terminées dans le sang ? De plus, il est certain que quantité de conquêtes sociales sont sans cesse remises en cause, comme l’époque actuelle nous le confirme.

 

 

Heureusement, Éric Vuillard promet une suite à cet essai, suite peut-être plus optimiste…

Jean-Paul

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