Marie-Hélène Lafon : Joseph

Joseph        par    Marie-Hélène Lafon.

Buchet-Chastel (2014) 139 pages ; Folio (2016) 128 pages.

 

Marie-Hélène Lafon parle très bien de ce qu’elle connaît, de cette vie à la campagne, dans la zone d’appellation du Saint-Nectaire, au bord de la Santoire, cette rivière qui l’a vue grandir.

 

 

Avec Joseph, elle a décidé de mettre en lumière la vie de ces employés de ferme dont on ne parle jamais. Sous ce prénom de Joseph, elle a réuni plusieurs personnes qu’elle a côtoyées dans la ferme de ses parents. Pour commencer, elle décrit superbement ses mains : « Elles ont l’air d’avoir une vie propre et sont parcourues de menus tressaillements. Elles sont rondes et courtes, des mains presque jeunes comme d’enfance et cependant sans âge. » La ferme où il se trouve n’est pas son premier travail et, au fil des pages, nous découvrons ce que fut sa vie, tous les écueils qu’il a dû surmonter, ses rares moments de bonheur et toujours cet amour du travail bien fait sans jamais se plaindre.

 

 

Ces ouvriers agricoles appelés autrefois domestiques partagent la vie de la ferme tout en étant obligés de rester très discrets : « Joseph ne laisse pas de traces et ne fait pas de bruit. » Il se lave au lavabo de l’étable. « Il avait appris à se méfier des gens que les bêtes craignaient. » À 58 ans, bientôt 59, ce qui le sauve, c’est sa mémoire précise. Il se souvient de tout. L’auteure décrit bien ses rapports avec ses employeurs, la veillée avec cette télé que personne ne regarde vraiment car le patron dort et la patronne fait des mots croisés… Pourtant, il aime regarder le patinage artistique en couple. Sa chambre est toujours bien rangée, pas comme celle du fils !

 

 

Reviennent aussi ses souvenirs d’école, cette Claire qui lui plaisait beaucoup mais qui est devenue religieuse. Il y a aussi ces moqueries qu’il doit supporter. Sur le monument aux morts de la commune, un homme tué durant la Première guerre mondiale s’appelle exactement comme lui, Joseph Rodde, et on le surnomme « le poilu ». Il le vit très mal.

 

 

Nous faisons aussi connaissance avec Michel, son frère, sa belle-sœur, puis sa mère. Enfin, il y a ses problèmes d’alcool causés principalement par sa rupture avec Sylvie. Depuis, il ne boit que de l’eau. Alors que le fils des patrons a une copine, « fréquente », Marie-Hélène Lafon rappelle l’expression employée : « prendre femme et faire maison. » Hélas, « Joseph n’a pas fait maison, les gens comme lui ne font pas maison. »

 

 

Petit livre plein de sensibilité et d’humanité, Joseph n’est pourtant pas si aisé à lire car l’auteure a fait le choix d’éliminer tout paragraphe, abusant aussi de trop longues phrases, parfois sans ponctuation. Heureusement, elle a divisé son récit en chapitres, ce qui permet au lecteur de faire quelques pauses et de se régaler.

Jean-Paul

 

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