Guy Boley : Quand Dieu boxait en amateur

Quand Dieu boxait en amateur       par    Guy Boley.

 Grasset (2018), 174 pages ; Foilio (2020) 192 pages.

 

Guy Boley (photo ci-dessous) se qualifie volontiers de romancier du réel et c’est vrai. Après Fils du feu, il confirme cette définition dans ce nouveau roman au titre énigmatique : Quand Dieu boxait en amateur.

 

 

Avant de consacrer le troisième livre de sa trilogie à sa mère, celui qui fut maçon, forgeron, funambule, rend un hommage magnifique à son père, un hommage romancé et sans concession, rempli d’une admiration sans borne, hommage à la fois dur et tendre.

 

Dès les premières lignes, je survole Besançon, ville natale de Victor Hugo et des frères Lumière, avant de zoomer vers cet hôpital de quartier où est né René Boley, le 3 mai 1926 : « Ce quartier fut toute sa vie, sa seule mappemonde, sa scène de théâtre, son unique opéra. Il y grandit, s’y maria, procréa. » Tout pourrait être dit mais voilà que l’auteur m’emmène déjà à la fin, à la mort de ce père, le 8 octobre 1999, dans ce même hôpital, à trois étages de distance…

 

 

« Car c’était lui, mon père, qui fut tout à la fois mon premier homme, ma première parole, ma première étincelle et ma première aurore. » Que c’est beau ! Et cela vient après une scène d’une intimité crue où le fils assiste son père qui ne peut plus uriner tout seul.

 

 

Ce père, forgeron que j’avais aimé voir en action dans Fils du feu, joue les utilités au théâtre municipal et monte des opérettes avec sa mère, petits spectacles dont ils régalent les voisins. Il lui a donné le goût des mots, mots que le fils retrouve dans un carnet, mots difficiles qui ne servaient pas mais qui côtoyaient un poème sur leur quartier des Chaprais.

 

 

Finalement et c’est normal, ce livre parle peu de la forge mais est axé sur les deux passions du père : la boxe et le théâtre. Au passage, une superbe phrase : « C’est un artiste, mon père, il est né comme ça et il n’y est pour rien : sensible, créateur, naïf, orgueilleux, entêté, innocent, fragile et responsable. » Il fut Champion de France amateur et partagea avec son fils une immense admiration pour Mohamed Ali.

 

Sans détailler la suite, il faut parler du meilleur ami de René Boley : Pierrot qui « rencontre Dieu comme on rencontre une femme ». C’est le point de départ de la fameuse pièce qui explique le titre du roman. Avec humour et causticité, l’auteur parle du spectacle paroissial, du curé arc-bouté sur ses principes et qui redoute les majorettes comme le diable mais l’abbé Delvault (Pierrot) parvient à mettre enfin en place ses idées. Ici, Guy Boley révèle un talent certain pour écrire les dialogues savoureux entre les deux amis et les débats enflammés avec le curé de la paroisse.

 

 

Si je trouve que cela prend beaucoup de place dans le livre, je reconnais l’importance de ce qui s’est passé alors que l’alcool commence à faire des ravages : « Il avait été Roi sur un ring, Jésus sur une scène, Zeus dans la forge, il était monté bien trop haut pour se permettre de descendre comme un simple mortel jusqu’au niveau d’un bar, ou pire d’un caniveau. »

 

 

Sensible, humain, plein de rêves assouvis ou non et surtout débordant d’amour filial « tandis que la bobine finit de dérouler l’ultime pellicule », c’est un livre magnifique, émouvant, comme chaque fils aimerait en écrire sur son père.

 

Merci à Masse Critique de Babelio et aux éditions Grasset pour cette belle lecture.

Jean-Paul

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