Lola Lafon : La petite communiste qui ne souriait jamais

La petite communiste qui ne souriait jamais   par   Lola Lafon. 

Actes Sud, (2013), 317 pages ; Babel (2015) 320 pages.

 

Prix de la Closerie des Lilas 2014 ; Prix Ouest-France Étonnant voyageurs 2014.

 

 

Nadia Comaneci (photo ci-dessous), jeune gymnaste roumaine qui éclaboussa de son talent les Jeux Olympiques de Montréal, en 1976, si vous ne connaissez pas, les vidéos mises en ligne permettent de découvrir ses exploits ou de se rafraîchir la mémoire. Avant elle, le 10 n’existait pas en gymnastique. Quand les juges ont voulu lui attribuer la note parfaite pour ce qu’elle venait de réaliser, la banque de données de Longines a sauté, le tableau lumineux ne pouvant afficher que : 1,00 !!!

 

 

Nadia n’a que 14 ans mais Béla Károlyí et son épouse, Martá, la font travailler très dur depuis près de huit ans, avec d’autres filles d’Onesti, petite ville située à près de 500 km au nord de Bucarest. Nadia « ne sculpte pas l’espace, elle est l’espace… La grâce, la précision, l’amplitude des gestes, le risque et la puissance sans qu’on n’en voie rien ! »

 

 

Lola Lafon connaît bien ce pays pour y avoir grandi. Elle raconte ce que fut Nadia jusqu’à sa fuite du pays quinze jours avant la chute de Ceausescu, plongeant dans la vie quotidienne des Roumains, leurs souffrances, leurs difficultés, sans oublier de mentionner les avantages d’un régime se voulant égalitaire avant de dériver, hélas, vers un totalitarisme ridicule.

 

 

La lecture de ce roman est passionnante de bout en bout grâce au talent de l’autrice qui a su mener à bien un dialogue imaginaire avec Nadia C. qui vit maintenant aux États-Unis. Cela lui permet de confronter les différentes versions de la vie de la championne et du monde qui l’entoure. Dans une vie, tout n’est pas blanc ou noir comme on tente trop souvent de nous le faire croire mais c’est justement la confrontation entre des récits différents des mêmes faits qui permet de se forger une opinion.

 

 

L’autrice nous fait partager le quotidien de ces petites championnes, sportives de haut niveau obligées de calculer tout ce qu’elles mangent, de subir des entraînements de plus en plus poussés avec les conséquences qui s’appellent claquages, entorses et les médicaments qui suivent : anti-inflammatoires, antidouleurs, corticoïdes… Parfois, les figures les plus étonnantes sont créées à partir d’une erreur très dangereuse mais Nadia, parvenait à écarter le danger.

 

 

Pour Nadia, le temps passe et elle devient femme. Elle a toujours envie de manger, rêve qu’elle mange alors que son corps subit les ampoules, les minuscules coupures, les bleus aux cuisses, les fibres musculaires qui lâchent, les tendons claqués et la codéine, la cortisone… Elle se sent laide, informe alors qu’elle subit cette « Maladie », ces règles qu’elle ne supporte pas. Ayant quitté Béla pour Bucarest, elle sort, danse, flirte avec un garçon, mange, ne s’entraîne plus. Elle est devenue « un monstre ».

 

 

 

Lola Lafon (photo ci-contre) parle alors du sort des Roumaines obligées d’avoir des enfants, subissant « la police des menstruations » jusque sur leur lieu de travail. Puis c’est la chute des Ceausescu, fin 1989, Nadia est aux USA  « réfugiée politique » dont l’image est ternie. Elle a 28 ans… Une autre vie commence mais ce qu’elle a réalisé en tant que sportive ne s’effacera  pas.

 

Jean-Paul

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