Delphine de Vigan : D'après une histoire vraie

D’après une histoire vraie      par    Delphine de Vigan.

JC Lattès (2015), 478 pages ; Le Livre de Poche (2017) 384 pages.

Prix Renaudot et Prix Goncourt des Lycéens 2015.

 

 

Après le succès remporté par Rien ne s’oppose à la nuit, Delphine de Vigan réussit une nouvelle prouesse littéraire, traitant à la fois de sa vie et des tourments d’une auteure devant la page vide et de son rapport avec la réalité.

 

En trois grandes parties, Séduction – Dépression – Trahison, l’auteure raconte sa vie avec L., cette femme dont on ne saura jamais le nom et qui n’a pas son pareil pour effacer toute trace de son passage, nous poussant même à douter de son existence réelle.

 

Avec beaucoup de sincérité, Delphine de Vigan confie son refus des étiquettes « comme des poulets sous cellophane » puis culpabilise après avoir refusé une dédicace à une lectrice retardataire, au Salon du livre, alors qu’elle est épuisée et va rencontrer L. « Le succès d’un livre est un accident dont on ne sort pas indemne, mais il serait indécent de s’en plaindre. »

 

Elle nous parle aussi de François, « l’homme qu’elle aime » mais dont elle ne partage la vie que très épisodiquement. Elle veut écrire un nouveau roman mais n’arrive pas à se décider. Ses débats avec L., leurs brouilles, leurs réconciliations permettent au lecteur de mieux appréhender tous les tourments vécus par celui ou celle qui veut écrire. Faut-il s’inspirer de la réalité ? Faut-il suivre cette mode des faits réels ?

 

Cette fameuse amie mystérieuse est là : « L. exerçait sur moi une douce emprise, intime et troublante dont j’ignorais la cause et la portée. » De menaçantes lettres dactylographiées lui arrivent et finissent d’apporter le trouble. Ses deux enfants, Louise et Paul, bac en poche, quittent le domicile où elle vit seule avant que L. la rejoigne pour empiéter encore plus sur sa vie.

 

 

Malgré toute sa bonne volonté, elle s’enfonce : « Écrire devenait un combat. » L. lui devient indispensable et s’occupe de tout, la sauvant de l’étouffement mais lui reproche d’ « aimer un homme qui passait son temps à recevoir et louanger d’autres écrivains… », allant jusqu’à la « comparer à une institutrice qui aurait choisi de vivre avec un inspecteur d’académie. »

 

L. étant censée écrire des biographies de gens célèbres sans que son nom apparaisse, elle se fait chiper celle de Gérard Depardieu par Lionel Duroy puis elle remplace Delphine de Vigan (photo ci-contre) dans un lycée de Tours pour une rencontre avec des élèves, se chargeant aussi d’envoyer un courriel à tous ses amis pour leur demander de la laisser tranquille parce qu’elle écrit.

 

Une chute dans un escalier va précipiter les choses et faire enfin éclore cette trahison, laissant le lecteur en suspens entre réalité et imaginaire, ce qui est finalement le lot de tout roman : « Même si cela a eu lieu, même si quelque chose s’est passé qui ressemble à cela, même si les faits sont avérés, c’est toujours une histoire qu’on se raconte. On se la raconte. »

Jean-Paul

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