Jean Echenoz : Ravel

Ravel     par    Jean Echenoz.

Les Éditions de Minuit (2006). 123 pages.

 

Toujours avec une écriture simple, directe, allant à l’essentiel, l’excellent romancier Jean Echenoz nous fait vivre les dix dernières années de Maurice Ravel (1875 – 1937), immense musicien, compositeur génial d’un Boléro qui trotte toujours dans un coin de notre tête.

 

 

L’auteur nous place, dès les premières lignes, dans l’intimité de cet homme, en 1928, à Montfort-l’Amaury où il habite, où il se prépare hâtivement à partir pour l’Amérique, sur le paquebot France. Une suite lui a été réservée sur le bateau et on le reconnaît car il est, comme Stravinsky, au faîte de sa célébrité : « Il est un homme sec mais chic, tiré à quatre épingles vingt-quatre heures sur vingt-quatre. »

 

S’il est très élégant, il emmène dans ses bagages « soixante chemises, vingt paires de chaussures, soixante-quinze cravates, vingt-cinq pyjamas… » mais aussi une petite valise pleine de Gauloises car il fume beaucoup, beaucoup trop.

 

 

L’auteur nous fait partager sa vie à bord, la lecture, le cinéma, la piscine, le salon de coiffure et la nuit du 31 décembre avec le repas à la table du commandant… Au passage, Ravel (photo ci-contre) a raconté sa guerre de 14, lui qui voulait s’engager mais qui avait été refoulé parce que trop frêle. Après dix-huit mois de démarches, il avait été enfin enrôlé comme conducteur au service des convois, section poids lourds. Ainsi, en 1916, il roulait près de Verdun.

 

 

Lorsqu’il donne un petit concert, deux jours avant l’arrivée à New York, l’auteur écrit : « Ce ne sont pas vraiment des mains de pianiste et d’ailleurs il ne possède pas une grande technique, on voit bien qu’il n’est pas exercé, il joue raidement en accrochant tout le temps. »

 

 

Lui qui n’a « aucune oreille pour les langues étrangères à l’exception du basque.» va se produire dans vingt-cinq villes, d’est en ouest, du nord au sud des États-Unis.

 

 

Revenu en France, il retrouve régulièrement son Pays basque natal puis compose son fameux Boléro après un mois de travail, suite à une demande de la danseuse russe, Ida Rubinstein. Il refuse la Légion d’Honneur. Sa rencontre avec Paul Wittgenstein, pianiste prisonnier de Russes, déporté en Sibérie, revenu sans son bras droit, motive Ravel pour écrire un Concerto pour la main gauche.

 

 

Hélas, sa santé décline vite même s’il repart en tournée avec Marguerite Long au piano et lui au pupitre. Un grave accident en taxi n’arrange rien. Son écriture se dégrade. Il ne reconnaît plus ses œuvres et, après avoir été opéré par un neurochirurgien, il meurt dix jours après, à 62 ans, sans laisser de testament ni aucune image filmée et pas le moindre enregistrement de sa voix.

 

 

Heureusement, la lecture du roman de Jean Echenoz (photo ci-dessus) qui a publié ensuite : Courir (2008), Des éclairs (2010), 14 (2012), Caprice de la reine, nouvelles (2014), Envoyée spéciale (2016) et Vie de Gérard Fulmard (2020)  permet de comprendre un peu qui fut Maurice Ravel.

Jean-Paul

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