Pascal Manoukian : Le paradoxe d'Anderson

Le paradoxe d’Anderson     par    Pascal Manoukian.

Seuil (2018) 294 pages ; Points (2019) 264 pages.

 

 

Le paradoxe d’Anderson est le fait que, malgré un niveau de diplôme supérieur à celui de leurs parents, les enfants ne parviennent pas à atteindre un statut social plus élevé que le leur. Il est au programme de terminale ES et Léa ne se doute pas encore de sa réalité.

 

 

Magnifique roman sur la condition ouvrière que Le paradoxe d’Anderson, de Pascal Manoukian qui m’a parfois fait songer à Gérard Mordillat. Une famille : la famille Boîtier, la mère, Aline, travaille chez Wooly, une usine textile, le père, Christophe, bosse chez Univerre, une manufacture de bouteilles. Ils ont deux enfants : Léa, 17 ans, qui prépare un bac ES et Mathis, 6 ans, fragile, sujet à des convulsions. Ce sont « leurs sources de lumière ». Ils vivent à Essaimcourt, au nord de l’Oise, dans un petit pavillon. Pour eux, c’est presque le bonheur et ils peuvent même faire quelques projets. Hélas, cela ne va pas durer.

 

 

Wooly décide de délocaliser et Aline va être licenciée. Elle décide de n’en rien dire aux enfants, surtout pour protéger sa fille qui doit absolument réussir son bac pour avoir un bel avenir.

 

 

Mais le drame ne va pas s’arrêter là… et c’est une véritable tragédie que va vivre cette famille. C’est ce que vivent les ouvriers qui perdent leur emploi du jour au lendemain, suite aux délocalisations, se retrouvant au chômage, endettés par des crédits à rembourser, broyés et acculés au désespoir que décrit si bien cet ouvrage.

 

 

 

Ce roman bouleversant sur les laissés pour compte est rythmé par les mois de l’année. Il débute en août, avec la fin des vacances scolaires, pour se terminer en mai de l’année suivante. Un personnage haut en couleur qui, bien que mort, est présent tout au long de ce livre : c’est Léon, dit Staline, communiste véhément, arrière-grand-père maternel de Léa.

 

 

De plus, Le Jeu des 1000 francs de France Inter auquel, justement, a participé Léon d’une manière inoubliable, clôturera ce roman en juxtaposant les questions du jeu avec les réponses entrecroisant Léa et Paul, son petit ami, avec les événements qui se passent à l’extérieur.

 

 

Pascal Manoukian (photo ci-dessus) nous tient en haleine d’une façon extrêmement puissante avec ce procédé. Ce livre d’un auteur que je découvrais, a été pour moi un véritable coup de cœur. Captivant du début à la fin, ce livre dur mais combien réaliste et bouleversant m’a pris aux tripes et je l’ai lu d’une traite.

 

 

C’est dans la vie avec toute sa fougue, toutes ses péripéties, toute sa noirceur mais aussi tout son burlesque que Pascal Manoukian nous entraîne jusqu’à nous faire perdre pied.

Ghislaine

 

Le paradoxe d’Anderson     par    Pascal Manoukian.

Seuil (2018) 294 pages ; Points (2019) 264 pages.

 

Voilà un livre qu’il faut lire pour tenter de comprendre tous les drames qui se produisent un peu partout en France depuis tant d’années avec ces délocalisations, ces fermetures d’usines qui marchaient bien, dont les carnets de commandes étaient fournis, entreprises souvent vendues à l’étranger et dont la fermeture cause d’impressionnants dégâts humains !

 

Gérard Mordillat a déjà bien montré le mécanisme de tels massacres, notamment dans Rouge dans la brume, François Bégaudeau l’a fait aussi récemment dans En guerre et, portant le même titre, le film de Stéphane Brizé avec un Vincent Lindon impressionnant, ont tenté d’éveiller nos consciences, comme d’autres que j’oublie sûrement.

 

Pascal Manoukian ajoute sa pierre à l’édifice, à sa manière avec Le paradoxe d’Anderson, ce paradoxe mis en valeur par un économiste américain qui a démontré que des enfants ayant un diplôme supérieur à ceux de leurs parents, n’atteignent pas forcément une position sociale plus élevée. D’ailleurs, Léa, la fille d’Aline et Christophe, travaille cette notion pour préparer le bac ES.

 

 

Tout va bien pour cette petite famille même si Mathis, le petit frère de Léa, inquiète avec une maladie difficile à soigner. Aline est ouvrière tricoteuse devenue responsable d’équipe chez Wooly, et Christophe réussit bien dans l’usine Univerre où les fours tournent à plein pour produire beaucoup de bouteilles.

 

Un jeu radiophonique célèbre intervient, Jeu des 1 000 francs, en 1973, à l’époque du grand-père de Léa, Léon, surnommé Staline pour ses opinions politiques tranchées. Lui succèdera le Jeu des 1 000 euros pour la scène finale extraordinaire.

 

Coup sur coup, Aline et Christophe se retrouvent au chômage, se battent avec leurs collègues de misère mais je n’en dis pas plus pour laisser au lecteur la découverte de l’engrenage infernal avec coups de théâtre et scènes magnifiques. Pascal Manoukian que je découvre avec ce roman, se révèle un auteur qui sait parler de notre époque, annonçant finalement toutes ces semaines de luttes et de manifestations que nous connaissons.

Jean-Paul

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Je n'ai pas encore découvert cet auteur et tu me donnes envie de le découvrir avec ce livre.<br /> Merci pour cette belle chronique :)<br /> Bonne journée !
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