Mikael Corre : Le Central

Le Central   par  Mikael Corre.

Bayard récits (2023) 184 pages.

 

 

Bayard récits est une collection de littérature du réel qui mêle grandes enquêtes et récits de l'intime, dans laquelle les autrices et auteurs racontent le réel en portant un regard singulier sur la société et dont les ouvrages sont au croisement du journalisme et de la littérature.

 

 

Le Central de Mikael Corre fait partie des trois titres parus pour le lancement de cette collection en avril 2023.

 

 

Après avoir réalisé au Central, le commissariat de la ville de Roubaix, un reportage sur le reconfinement pour La Croix, le journal pour lequel il travaille, afin d’observer comment la reprise des attestations obligatoires est vécue par la population, Mikael Corre a déjà dans l’idée de passer un an dans un commissariat : « À l’heure où la police fait l’objet d’incessants débats, je veux comprendre ce que c’est qu’être flic. » Il veut raconter leur quotidien.

 

 

Pendant un an, l’auteur a alors mené une enquête en immersion auprès de ce même commissariat de Roubaix.

 

 

De cette expérience, Mikael Corre tire ce récit plein d’enseignements sur ce que vivent les policiers. Il relate la manière dont se passent les arrestations, les auditions et la technique utilisée. Il assiste à une autopsie. Il a l’occasion ensuite, de discuter avec plusieurs policiers, du moment où, psychologiquement certains craquent… Il découvre également l’état des geôles, ces geôles toujours pleines et qui ne peuvent donc être nettoyées…  Sont aussi évoquées les violences policières, les contrôles au faciès, les violences conjugales, les rodéos, les points de deal, au total pas moins de vingt chapitres, courts mais très évocateurs des doutes et des questionnements qui hantent les policiers.

 

 

Balayant tous les clichés qui circulent sur la police et son rôle dans la société, Mikael Corre (photo ci-dessous) a su trouver et écouter des hommes qui acceptent de parler de leur métier avec honnêteté. Il en dresse des portraits précis et sensibles.

 

Il ressort tout au long de l’enquête que ces policiers sont en permanence mis en présence de  la violence et de la mort, qu’ils sont souvent polytraumatisés et qu’il y a un manque d’encadrement flagrant.

 

Ces hommes et ces femmes confrontés à la misère sociale, à la violence qui en découle, face aux difficultés qu’ils rencontrent dans leur travail, à la mort parfois à laquelle ils échappent de peu ou qu’ils sont parfois à deux doigts de donner, sont quelque peu découragés, se sentant souvent incompris et abandonnés. Mais, comme le lui a écrit un vieux major : « ce qui m’étonne toujours dans notre métier, c’est la volonté et résilience de mes collègues à se remettre à la tâche. »

 

 

La lecture de ce récit nous fait prendre conscience des difficultés que rencontrent les policiers pour mener leurs missions et nous amène à réfléchir sur ce métier de policier si souvent décrié par rapport aux attentes que l’on a.  On aimerait tant une société sans infractions, sans crimes… Pour que la police soit en capacité d’aider à ce que cette utopie advienne, il faudrait lui en donner les moyens, mieux l’organiser avec un encadrement conséquent, mieux la former mais ce n’est pourtant pas elle qui pourra réparer la société et colmater les plaies ouvertes par la pauvreté. Il faut cesser de lui demander l’impossible.

 

 

Si la police ne peut pas tout faire, son action n’est cependant pas inutile !

 

Je terminerai par cette pensée de l’auteur : « je finis par intégrer que la police n’est pas là pour faire baisser la délinquance mais pour la contenir. »

 

Ghislaine

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S
Un récit qui est particulièrement d'actualité... L'approche en immersion est intéressante. Je ne suis pas très "lectures du réel" habituellement, mais ce livre-ci m'intéressera certainement.
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