Caryl Férey : Okavango

Okavango    par  Caryl Férey

Gallimard/Série noire (2023) 526 pages.

Rentrée littéraire 2023.

 

 

 

Okavango, un thriller haletant qui se déroule dans ces contrées peu explorées d’Afrique australe,  possède tous les atouts pour une adaptation au cinéma. Un cadre paradisiaque au cœur des réserves africaines où se révèle toute la beauté du monde sauvage mais cette faune sauvage africaine est l’objet de toutes les convoitises et la proie de tous les trafics.

 

 

L’Okavango est un fleuve qui prend sa source en Angola central, avant de traverser la Namibie pour atteindre le Botswana. Il a la particularité de ne jamais rejoindre l’océan, il est le seul fleuve au monde à se jeter dans la terre, son cours s’achève par un vaste delta dans le désert du Kalahari.

 

 

Roman policier, mais également roman d’amour, car si l’intrigue haletante est sur fond de massacres et trafics d’animaux sauvages, de belles histoires d’amour nous sont contées, la plus belle étant celle que porte Caryl Férey, par le biais de certains de ses personnages, aux animaux et à la nature dans son intégralité.

 

 

Okavango s’ouvre sur la découverte du corps sans vie d’un jeune pisteur, en plein cœur de Wild Bunch, une immense réserve animalière à la frontière namibienne. C’est la ranger Solanah Betwase engagée avec ferveur dans la lutte anti-braconnage qui va mener l’enquête, une enquête très difficile, d’autant que John Latham, le propriétaire de la réserve est un personnage ambigu et plutôt misanthrope… De plus, un autre homme dit « Le scorpion », un vrai méchant, va bientôt faire surface, un mercenaire recyclé dans le braconnage, le chef de la mafia locale, le pire braconnier du continent. L’aide de Seth, jeune équipier Khoï de Solanah et de Priti, cette jeune San, sera bien utile à Solanah pour dénouer l’intrigue, mais sera-t-elle suffisante ?

 

 

Une magnifique couverture et une carte proposée dans les premières pages permettant de situer l’intrigue, mettent le lecteur dans de bonnes conditions de lecture.

J’ai été sidérée par cette intrigue diaboliquement ficelée, émerveillée par la beauté de ce monde sauvage mais effrayée et carrément stupéfaite en apprenant les ravages qu’on lui inflige.

 

 

J’étais assez loin de me douter des atrocités que l’homme était capable de faire subir aux animaux et d’apprendre que plus ils sont menacés d’extinction et plus ils prennent de la valeur.

 

 

C’est toute la logique capitaliste ! Ainsi cette corne de rhinocéros utilisée dans la médecine traditionnelle asiatique et qui peut atteindre des valeurs faramineuses à la bourse de Hong Kong car, censée doper la libido de celui qui en mange. Quand on sait qu’elle est composée de macronutriments que l’on retrouve tout simplement dans nos cheveux et dans nos ongles, on aimerait pouvoir en rire… Mais des braconniers opèrent, manipulés par des trafiquants intouchables.

 

 

J’ai beaucoup appris sur ces Khoï, peuple pastoral et ces San, chasseurs-cueilleurs, reconnus pour leur langue qui comporte des clics, en fait des claquements de langue, longtemps discriminés et chassés par les colons néerlandais puis britanniques, qui montrent qu’un autre rapport au monde est possible, vivre en harmonie avec son biotope.

 

 

Le charme du bouquin vient également de la richesse et de la complexité des personnages.

Les personnages féminins sont magnifiques. Comment ne pas être admiratif devant cette ranger Solanah, cette femme mal dans sa peau, mal dans son couple, qui se bat pour son autonomie. Elle porte tellement de choses qu’elle se voit plus grosse que ce qu’elle n’est et il est particulièrement  intéressant et plaisant de la voir peu à peu se débarrasser de tout ça.

 

 

Quant à Priti, ce petit bout de femme San, je vous laisse découvrir son énergie, sa roublardise et toute la luminosité qu’elle apporte au polar. Solanah, Priti : deux femmes puissantes !

 

 

Impossible de terminer sans évoquer ces scènes terribles de cruauté ou d’entraide envers les animaux que Caryl Férey, rencontré aux Correspondances de Manosque 2023, nous décrit mieux que n’importe quel cinéaste ne pourrait nous les montrer !

 

 

Il est dur de constater que le rapport aux animaux sauvages et aux braconniers est symbolique de l’état de notre planète et que seuls quelques échos fugitifs dans les médias relaient ces informations.

 

 

On ne peut que souhaiter, s’il n’est déjà pas trop tard, que ce thriller Okavango de Caryl Férey fasse considérer le monde d’une autre manière, que l’on comprenne que la liberté de ces animaux sauvages est en réalité aussi la nôtre, s’en prendre à la leur, c’est s’en prendre à la nôtre !

 

 

 

Comme les précédents ouvrages de Caryl Férey (Paz, Lëd, Norilsk), Okavango encore peut-être davantage, si cela est possible, a été un véritable coup de cœur !

 

Ghislaine

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
M
Je viens donc de le rajouter à ma longue liste, en plus il est présent dans ma médiathèque...Il me tente beaucoup moi-aussi. Merci
Répondre
D
Merci à vous 2. Je ne peux que vous inciter, à nouveau, à le lire...
Répondre
D
il avait déjà été très convainquant à Manosque, ton post vient compléter l'envie de lire une fois de plus cet excellent auteur !
Répondre
S
Je n'apprécie pas spécialement les thrillers, mais je dois bien admettre que celui-ci me tente beaucoup. Son thème m'attirait déjà et les portraits de femmes dont tu parles achèvent de me convaincre !
Répondre
Thème Magazine -  Hébergé par Overblog